Le Coran, âme de l’Univers (2/2)

Vie spirituelle

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   Dans la première partie de l’article, il était question de savoir ce que représente le Coran et quelle est la place de l’être humain dans ce monde. Cette deuxième partie traite plutôt de la relation que doit entretenir l’homme avec l’âme de l’Univers pour espérer appartenir à la famille de Dieu…

Deuxième étape : méditer le Coran

   Après s’être situé en tant qu’être humain dans l’Univers et avoir attribué au Coran sa véritable place, il incombe à chaque musulman de méditer le Livre Saint, car si celui-ci est une âme, il suscite une revivication du cœur croyant. Allâh dit : « C’est un Livre béni que Nous t’avons révélé afin que les hommes de bon sens en méditent les versets et s’y arrêtent pour réfléchir. », s.38 Sâd, v.29.

   Le Coran n’a pas été révélé uniquement pour être psalmodié sans émouvoir les cœurs. Il est descendu pour être médité par l’esprit et l’intelligence, pour mener à une réflexion qui favorise la prise de conscience. Ce réveil de la conscience construit ensuite la personne humaine pour en faire un être complet et épanoui. La réflexion est si importante qu’Allâh a réprimandé ceux qui ne méditent pas sur les versets coraniques : « Ne méditent-ils pas le Coran ou leurs cœurs sont-ils cadenassés ? », s.47 Mouhammad, v.24.

   Ce verset ne s’adresse pas forcément à ceux qui sont loin de l’Islam, il interpelle principalement ceux qui ouvrent le Coran, qui le lisent mais dont les cœurs sont verrouillés.

   Méditer le Coran revient à approfondir la compréhension de ses versets, s’imprégner de leur signification, ressentir l’impact qu’ils peuvent produire sur le cœur, le comportement et sur l’état de l’âme.

   Méditer le Coran, c’est se positionner par rapport à ses versets, c’est se demander si on fait partie de ceux qui le traduisent en une pratique ou de ceux qui ne cherchent pas outre.

   Méditer le Coran, c’est en tirer les leçons, les moralités relatives aux histoires qu’il raconte : les histoires des prophètes, les histoires des peuples précédents, l’histoire de la création de l’homme, l’histoire de la création de l’Univers, l’histoire du devenir de la création d’une manière générale.

   Par exemple, le Coran parle énormément de la création de l’Univers ; étant donné qu’il est l’âme de ce monde, qui mieux que lui peut décrire l’Univers et renseigner sur son utilité ? Allâh dit à ce propos : « En vérité, il y a dans la création des Cieux, de la Terre et dans l’alternance de la nuit et du jour tant de signes pour des gens doués d’intelligence, qui debout, assis ou couchés ne cessent d’invoquer Dieu et de méditer sur la création des Cieux et de la Terre en disant : « Seigneur, ce n’est pas en vain que Tu as créé tout cela, gloire à Toi. Préserve-nous du châtiment de l’enfer Seigneur, celui que Tu voues aux flammes de la Géhenne, Tu le couvres d’opprobre et les injustes ne bénéficieront d’aucun secours. Seigneur, Nous avons entendu une voix qui nous conviait à croire en Toi et nous avons cru, Seigneur, pardonne-nous nos péchés. Absous nos mauvaises actions et reçois-nous après notre mort parmi les justes. Seigneur accorde-nous ce que Tu nous as promis par l’intermédiaire de Tes messagers. Epargne-nous toute humiliation au jour de la résurrection, Toi qui ne manque jamais à Tes promesses. »», s.3 Âl-‘Imrâne (La Famille ‘Imrâne), v.190-194.

   Les doués d’intelligence réfléchiront sur les différents éléments de la création, ils se poseront les questions de savoir quel est le but de cet Univers, pourquoi le jour et la nuit s’alternent… les autres malheureusement sont dénués de raison, faculté qui leur permettrait de méditer, de reconnaître la grandeur, la puissance et la beauté du Créateur.

   Considérer sa petitesse par rapport à l’immensité de l’Univers est un facteur d’angoisse qui pousse le croyant à demander la protection d’Allâh . La méditation sur la création l’incite à reconnaître ses péchés et à demander pardon à Dieu.

   Des invocations ferventes émanent d’un sentiment profond né dans le cœur après que le suppliant ait contemplé la création d’Allâh . Cet émoi abyssal engendre une crainte révérencielle de la majesté, de la grandeur et de la puissance de Dieu, ce qui pousse le croyant à se réfugier dans les demeures de la miséricorde d’Allâh et dans la beauté de Son pardon.

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   Le Coran renvoie toujours son lecteur à la contemplation des étendues de l’Univers, car le lien qui le relie au Coran est très étroit. La lecture du Livre Saint invite à la lecture de l’Univers et l’attention portée à l’Univers incite à la lecture du Coran. La contemplation de l’Univers et la méditation du Coran deviennent deux éléments complémentaires et indissociables pour découvrir Allâh .

   En somme, le Coran et l’Univers ne constituent qu’un ensemble de signes. Le mot arabe « âya » est communément traduit en français par « verset », mais en réalité, ce mot signifie « signe coranique ». Chaque verset est donc un signe qui mène vers Allâh , tout comme chaque élément de la création. L’Univers, Livre visuel, et le Coran, Livre oral, sont donc complémentaires : le premier étant créé et le second incréé, ce dernier ne peut être que l’âme du premier.

   L’être humain possède un corps palpable et visible, et une âme immatérielle et presque éternelle. Lorsqu’il quitte la vie d’ici-bas, son corps meurt et son âme est élevée vers Allâh ; lors de l’enterrement, elle vient se rapprocher du corps, et lorsque la personne est ressuscitée, cette âme réintègre le corps. Elle est toujours existante, à l’instar du Coran pour l’Univers. Celui-ci va disparaître, mais pas le Coran puisqu’il est la parole d’Allâh , un des attributs divins qui n’a ni début ni fin.

   L’homme est créé de terre et retournera vers cette terre. Cette matière modelable est un élément de la planète Terre, qui fait partie du système solaire. Le soleil ne constitue qu’une étoile parmi les 100 milliards d’astres qui composent la Voie Lactée. Celle-ci n’est qu’une infime partie de l’Univers qui comporte des millions d’autres galaxies. La Voie Lactée s’apparente à un disque vinyle qui tourne autour d’un axe central ; 250 millions d’années lui sont nécessaires pour effectuer un seul tour !! Le soleil, lui, suit un mouvement d’une vitesse de 150 millions km/s pour réaliser cette même course ! Allâh signale cette vérité dans le Coran : « C’est Lui Qui a créé la nuit, le jour, le soleil et la lune, chacun voguant dans une orbite bien déterminée. », s.21 Al-Anbiyâ’ (Les Prophètes), v.33.

   La lune tourne autour de la Terre, et celle-ci effectue une rotation sur elle-même et autour du soleil qui pivote sur lui-même et autour de l’axe de la galaxie, laquelle vogue dans l’Univers.

   Mais la découverte la plus importante annoncée par la science moderne est l’expansion de l’Univers. Ce fait actuellement bien établi ne connaît qu’un seul débat qui porte sur la façon dont il s’étale. La taille de l’Univers augmentant constamment, les galaxies s’éloignent les unes des autres. Allâh a dévoilé cette vérité depuis quatorze siècles : « Le ciel, Nous l’avons solidement édifié et Nous élargissons constamment son étendue. », s.51 Adh-Dhâriyât (Les Ouragans), v.47. Allâh révèle quelques informations concernant les mystères de l’Univers, comme Il le précise dans sourate 11 Hoûd, v.49 : « Voilà quelques nouvelles du mystère du monde que Nous te révélons, tu ne les connaissais pas auparavant, pas plus que ton peuple. »

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La Voie Lactée (Sun = soleil)

   Même si le Coran n’est pas un livre d’astronomie, il invite son lecteur à méditer sur les astres. Plus l’être humain progresse dans les découvertes scientifiques, plus il ressent la grandeur du Coran, l’âme qui a dévoilé certains secrets de l’Univers. Le voyage par la méditation et la contemplation de l’immensité de ce monde amène l’homme à ressentir son insignifiance, à se prosterner devant le Créateur de l’infiniment grand et de l’infiniment petit. Malgré la place minuscule que l’homme occupe au sein du cosmos, Dieu décide de s’adresser à lui par miséricorde et par clémence par l’intermédiaire de l’âme de l’Univers. Le croyant sincère, à peine prend-il le Coran qu’il ressent la valeur inestimable de ce qu’il tient entre les mains, qu’il conçoit le privilège que Dieu lui accorde. D’ailleurs, Il dit : « Si Nous avions fait descendre ce Coran sur une montagne, on la verrait s’affaisser et se fendre par crainte du Seigneur. Ce sont là des exemples que Nous offrons aux hommes pour les amener à réfléchir », s.59 Al-Hachr (L’Exode), v.21.

   Si Allâh avait donné à la montagne la capacité de réfléchir et de comprendre que ce Coran est la parole de Dieu, elle s’effriterait. Bien que l’homme soit doté de ces facultés, il ne donne pas au Coran la valeur qu’il mérite : il faut lire et méditer ses versets convenablement. Le Prophète dit à ce propos : « Apprenez ce Coran et psalmodiez-le car vous serez récompensés sur sa psalmodie pour chaque lettre dix hassanâtes. Je ne dis pas alif lâm mîm [lettres par lesquelles débutent certaines sourates] dix hassanâtes, mais alif dix hassanâtes, lâm dix hassanâtes et mîm dix hassanâtes. Ce Coran c’est la lumière manifeste, le remède efficace, la délivrance pour celui qui le suit, et la protection pour celui qui s’y attache. Il ne fléchit jamais, ses mystères ne se terminent jamais et ne perd pas sa fraîcheur, même si on le relit sans cesse. »

   Dans ce hadîth, le Prophète montre que le croyant est rétribué par dix hassanâtes pour chaque lettre prononcée lors de sa lecture du Coran. Or une lettre est un élément vocal dénué de sens, mais lorsqu’elle est coranique, elle revêt un caractère particulier qui lui donne une sacralité divine.

   Si le musulman trouve des difficultés à lire ou à psalmodier le Coran de façon fluide, il sera tout de même récompensé. Le Prophète dit à cet égard : « Celui qui lit le Coran avec perfection sera avec les anges nobles et celui qui lit le Coran avec une grande difficulté aura deux récompenses ». Celui qui est attaché à la lecture du Coran devient forcément très proche de Dieu. Le Prophète dit : « Dieu a sur Terre des gens qui sont les Siens [de sa famille] ». On a demandé au Prophète qui étaient ces gens, il a répondu : « Les gens du Coran sont les gens de Dieu ». Mais comment faire partie des gens du Coran ? Plusieurs exigences sont à respecter.

Appartenir à la famille de Dieu

   La première exigence consiste à acquérir la perfection de la psalmodie du Coran sur le plan technique. Allâh dit : « (…) et psalmodie le Coran de la meilleure des façons », s.73 Al-Mouzzammil (Celui qui s’enveloppe), v.4. Ce devoir incombe à chaque musulman et à chaque musulmane, tout comme il est obligatoire de prier ou de jeûner. La science du tajwîd se transmet oralement et nécessite un entraînement accompagné.

   ‘Alî Ibnou Abî Tâlib disait : « La psalmodie du Coran est de savoir comment prononcer les lettres et savoir où on s’arrête ». Al-Boukhârî rapporte que « le Prophète faisait apparaître chaque lettre clairement, allongeait la voix sur chaque voyelle longue, il mettait en valeur les assonances d’extrémités des versets par l’arrêt systématique sur chacun des versets ». ‘Aïcha disait : « Si quelqu’un jure par Dieu que celui qui lit par « al-hadrama » [sans respecter les règles de lecture] n’a pas lu le Coran, alors il ne doit donner aucune expiation. » En effet, le lecteur doit respecter un minimum de règles pour honorer le Livre de Dieu. Un homme, fier de lui, vint à Ibnou Mas’oûd et lui dit : « J’ai lu toutes les sourates d’Al-Moufassal [partie coranique allant de sourate Al-Houjourâte jusqu’à la fin du Coran] en une seule nuit ! » Ibnou Mas’oûd l’a regardé et lui dit : « En les récitant rapidement comme on récite des vers d’une poésie ? Si tu avais respecté les règles techniques de la lecture du Coran, tu ne pouvais pas terminer la lecture d’Al-Moufassal en une seule nuit ». D’ailleurs, les savants déconseillent de terminer le Coran en moins de trois jours, il faut prendre le temps de bien prononcer chaque lettre et de bien méditer.

   Enfin il ne faut jamais se vanter lorsque Dieu nous donne le privilège de bien lire le Coran, car le Prophète dit à cet égard à un moment où l’Islam n’avait pas dépassé la péninsule arabique : « Cette religion va triompher, elle traversera les océans, les chevaux investiront la terre dans le sentier de Dieu, ensuite viendront des gens qui liront le Coran et diront : « Personne ne lit mieux que nous, personne n’est plus savant que nous » », ensuite le Prophète s’est adressé aux gens autour de lui et leur a dit : « Voyez-vous du bien en ces personnes ? », ils ont dit non, et il répliqua : « Ces gens sont de cette communauté et sont les combustibles du feu. »

   Après s’être perfectionné sur le plan technique, il est impératif d’investir le champ artistique : embellir le Coran par la voix. Le Prophète recommandait que l’on mette davantage en exergue la beauté du texte coranique par le moyen de la beauté naturelle de sa voix. Il dit à ce sujet : « Embellissez le Coran par vos voix. » Le Coran est intrinsèquement beau, mais lorsqu’il est lu par une jolie voix, ses versets entrent plus facilement dans les cœurs.

   Le Prophète avait justement fait les éloges d’Aboû Moûssâ Al-Ach’arî et de Sâlim pour la qualité de leur psalmodie du Coran dans un hadîth rapporté par Al-Boukhârî, Mouslim et Ibnou Mâjah. Un jour, le Prophète a entendu Ibnou Mas’oûd lire le Coran, et est resté à l’écouter. Le lendemain, il lui dit qu’il avait trouvé sa lecture de la veille très belle. Ibnou Mas’oûd observa : « Si je savais que tu m’écoutais, je l’aurais rendue encore plus belle » Le Prophète venait souvent chez Ibnou Mas’oûd pour lui demander de lui lire le Coran. Le Compagnon, plein de modestie, lui répondait : « Veux-tu que je te lise le Coran alors que c’est sur toi qu’il a été révélé ? », et le Prophète de rétorquer : « Oui, j’aime l’entendre de quelqu’un d’autre ».

   L’Envoyé de Dieu fut un jour questionné sur la nature de la meilleure voix, il répondit : « La meilleure voix qui lit le Coran est celle de la personne qui, lorsque tu l’entends réciter, tu ressens qu’elle craint Allâh . » La crainte d’Allâh passe par une lecture empreinte de tristesse.

   Outre ces deux impératifs, la méditation du Coran reste l’exigence la plus importante. En arabe, c’est « at-tadabbour », mot qui découle de « doubour » qui veut dire « l’arrière (d’une chose) ». Lorsqu’on parle de « tadabbourou-l-qor’âne », cela signifie « déterminer ce qui se trouve derrière les versets coraniques ». À chaque fois que le musulman lit un verset, qu’il fournit l’effort de méditer, il découvre des secrets selon le contexte de sa lecture et sa prédisposition à les comprendre. Ilyâs Ibnou ‘Amr a dit : « ‘Alî Ibnou Abî Tâlib m’a dit un jour : « Si tu survis longtemps, tu verras trois genres de lectures du Coran : une lecture pour Dieu, une lecture pour la vie (le monde) et une lecture pour la polémique. Chacun arrivera à la destination pour laquelle il lisait. » » Celui qui lisait pour Dieu, sera récompensé pour Dieu ; celui qui lit pour la vie, aura le bien de la vie (gain d’argent lors de lectures pour mariages, funérailles) mais n’obtiendra rien d’Allâh ; et celui qui le lit en vue de polémiquer tombera dans la polémique, Allâh le jugera en conséquence. Le Prophète disait à juste titre : « Lisez le Coran tant que vos cœurs sont rassemblés autour de lui, et tant que vous divergez, laissez la lecture du Coran ». Ce hadîth ne s’adresse pas aux savants qui apportent des preuves, mais aux profanes qui cherchent à imposer leurs avis.

   Le Prophète dit également : « Ce Coran sera lu par des gens qui le boiront comme on boit de l’eau, mais il ne dépassera pas le creux de leur clavicule. »

   S’attacher fermement au Coran est salvateur, le Prophète a dit : « J’ai laissé parmi vous deux [choses] avec lesquelles vous ne vous égarerez jamais : le Livre de Dieu et ma sunna » (hadîth authentique rapporté par Al-Hâkim dans Al-Moustadrak). La sunna vient expliquer ou détailler le Coran. Ce hadîth résume à lui seul le remède nécessaire au recouvrement de la gloire et de la grandeur de la civilisation musulmane.

   Le Prophète était justement l’incarnation du Coran comme le dit ‘Aïcha : « Son caractère était le Coran », rapporté par Mouslim. Dans une autre version, elle disait « Le Prophète était un Coran qui marchait sur Terre ».

   Quoique l’on dise sur le Coran, il est impossible de cerner l’ensemble de ses qualités et de ses secrets. L’apaisement qu’il procure à son lecteur est inégalable, mais pour pouvoir y accéder, l’apprentissage de la langue arabe reste incontournable. Elle est la seule langue apte à véhiculer véritablement la grandeur du Livre de Dieu et à en faire apprécier la réelle saveur.

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