La sincérité
Selon Aboû Rouqayya Tanîm Ibnou Ad-Dârî , le Messager d’Allâh a dit : « La religion, c’est la sincérité [« An-Nassîhah »].
— Envers qui ? lui demandâmes-nous.
— Envers Dieu, Son Livre, Son Messager, les imâms et l’ensemble de la communauté musulmane », répliqua-t-il, (hadîth rapporté par Mouslim).
De l’avis des doctes musulmans, cette parole prophétique est « le pivot de l’Islam » ; comme toujours, le Prophète manie à merveille l’art d’énoncer un message profond en peu de mots.
Par sa concision, ce hadîth incite les croyants à réfléchir sur cinq points capitaux qui rendent complète la sincérité des musulmans à l’égard de leur religion.
La sincérité envers Allâh :
Cheminer vers cette sincérité implique de la part des croyants un effort du cœur et de l’intellect pour parvenir à la connaissance du Créateur à travers Ses attributs. A ce stade, les croyants se refusent d’entacher leur foi en associant quiconque ou quoique ce soit à la toute puissance divine d’Allâh . Ils écartent de Lui toute insuffisance, préservant ainsi leur certitude en Sa sublimité et Sa perfection.
La sincérité à l’égard de Dieu, c’est Lui obéir dans tout ce qui Lui plaît et fuir tout ce qui Le courrouce ; c’est aimer et détester pour Lui, compter parmi ses alliés ceux qui se plient aux injonctions divines et tourner le dos aux désobéissants.
Par la grâce d’Allâh , cette sincérité ne profite qu’aux croyants, car Le Très-Haut, Celui Qui subsiste par Lui-même et par Qui tout subsiste (Al-Qayyôum), se passe intrinsèquement de la sincérité et de la servitude des hommes.
La sincérité envers le Livre de Dieu :
Elle s’exprime d’abord par le respect de tous les écrits ayant précédé la révélation du Coran : les Feuillets d’Ibrâhîm , les Psaumes de Dâoûd (David ; ), la Thora de Moûssâ (Moïse ; ) et l’Injîl d’‘Issâ (Evangile de Jésus ; ).
Elle est ensuite la croyance que le noble Coran clôt toutes les autres révélations, qu’il est la Parole miraculeuse de Dieu qui témoignera pour ou contre les humains.
Elle est enfin la certitude qu’Allâh est Le Garant de la préservation du Livre saint :
« C’est Nous qui avons fait descendre le Livre de rappel et c’es Nous qui en assumons la conservation », s.15 Al-Hijr, v.9.
Concrètement, manifester de la sincérité envers le Coran, c’est l’honorer par sa lecture et son apprentissage assidus, car y a-t-il meilleur discours que Celui de Dieu ?
Pour ce faire, primo, il est vivement recommandé d’embellir la voix, de psalmodier les versets afin d’émouvoir le cœur et de toucher l’âme : « Celui qui ne psalmodie pas le Coran en le récitant n’est pas des nôtres », (rapporté par Mouslim) ; secundo, de méditer le sens des signes y contenus : « Que ne méditent-ils le Coran ? Auraient-ils les cœurs complètement cadenassés ? », s.47 Mouhammad, v.24 ; tertio, de comprendre, puis d’agir, car il n’y a aucun bénéfice à détenir un savoir incompris et à ne pas l’appliquer dans le cas inverse : « Ô vous qui croyez ! Pourquoi dîtes-vous ce que vous ne faîtes pas ? C’est une grande abomination auprès de Dieu que de dire ce que vous ne faîtes pas », s.61 As-Saff (Le Rang), v.1-3 ; et en dernier lieu, d’enseigner le Coran aux musulmans pour perpétuer le message divin : « Le meilleur d’entre vous est celui qui apprend le Coran et l’enseigne », (rapporté par Al-Boukhârî).
Derechef, qui, véritablement, tire avantage de cette pratique pieuse ? La réponse est évidente, de même que les gains issus de la proximité du Coran :
Les croyants acquièrent la science sacrée ;
ils purifient leur âme ;
ils nettoient leur conscience des impuretés ;
La piété croît ;
Les bonnes actions sont consignées dans le registre de leurs auteurs ;
Le Coran intercède en faveur de Ses fidèles au Jour de la Résurrection : « Lisez le Coran, car il intercédera pour les siens le Jour de la résurrection », (rapporté par Mouslim).
La sincérité envers le Messager de Dieu :
Elle se concrétise par la croyance à et en sa mission prophétique. Elle se traduit par l’amour et l’obéissance voués à la personne de Mouhammad : « Dis : « Si vous aimez Dieu, suivez-moi pour que Dieu vous aime et vus pardonne vos péchés » », s.3 Âli- ‘Imrâne (La Famille ‘Imrâne), v.31 ; « Celui qui obéit au Messager a en fait obéit à Dieu », s.4 An-Nisâ‘ (Les Femmes), v.80.
Cet amour et cette obéissance perdurent au-delà de la disparition inéluctable du Prophète : les croyants se rappellent mutuellement son souvenir en continuant à appliquer sa sounna et son bon agissement ; ils méditent sur sa biographie et en tirent des leçons édifiantes ; ils contribuent à la diffusion de sa sounna dans la oumma, ils la défendent contre les innovations extrémistes et tendancieuses.
La sincérité envers les imâms des musulmans :
Le Coran dit : « Obéissez à Dieu, obéissez à Son Messager et à ceux d’entre vous qui détiennent le pouvoir », s.4 An-Nisâ‘ (Les Femmes), v.59.Par détenteurs du pouvoir (les imâms), on entend :
les dirigeants ou leurs représentants : d’une manière désintéressée, les musulmans leur manifestent de la sincérité en leur obéissant dans la justice et la vérité ; ils les assistent en les conseillant avec douceur et sagesse. Ils doivent les aimer pour leur piété, leur droiture et leur gouvernance équitable, n’hésitant pas à dénoncer l’injustice judicieusement : « Le meilleur combat (au service de Dieu) est une parole de justice et de vérité prononcée chez un tyran », dixit le Prophète ; car il n’y a pas pire communauté que celle qui se comporte comme un troupeau de bétail et qui ne s’acquitte pas du devoir de conseil au gouverneur qui s’érige en tyran.
Les doctes dans la religion ou les réformateurs : ils sont les astres de la communauté musulmane, et, subséquemment, ils s’obligent à combattre les déviances religieuses de toutes leurs forces intellectuelles en puisant leurs arguments dans le Coran et la sounna. Leur rôle de conseillers auprès des dirigeants et de leurs représentants relève d’une responsabilité encore plus importante que celui du commun du peuple. A cet égard, les croyants se montrent sincères envers eux en leur rappelant le poids de cette responsabilité et en plaçant leur confiance en eux et en les hadîths qu’ils énoncent. Les musulmans s’abstiennent de nuire à leur réputation, de les dénigrer : il en va de leur prestige et cela leur évite de devenir des cibles privilégiées des attaques et accusations infondées.
La sincérité envers la communauté musulmane :
Il est du devoir des musulmans de se conseiller mutuellement, de commander le bien et de blâmer le mal, et ce, afin d’orienter la oumma vers ses intérêts. La sincérité se traduit, en outre, par :
La préservation des secrets des gens et leurs actes répréhensibles ;
l’abandon de la jalousie et de la tricherie ;
le respect des aînés et l’indulgence vis-à-vis des plus jeunes ;
la lutte contre les nuisances et la promotion de tout ce qui est utile ;
le fait de combler les lacunes de la société.
Le Prophète a dit : « Si votre frère vous demande conseil, conseillez-le. »Le conseil est un devoir collectif, cela signifie que si une personne agit en ce sens, les autres en sont dispensées. Le conseil est une obligation pour le conseiller qui sait qu’il sera écouté, obéi et qu’il ne subira aucun préjudice. Dans le cas inverse, il s’abstiendra d’intervenir.
La politesse exige que le conseiller agisse avec tact et discrétion, c’est pourquoi il est dit : « Celui qui exhorte son frère en secret, loin des gens, il l’a effectivement conseillé. Quant à celui qui l’exhorte au su et à la vue de tout le monde, il l’a en fait blâmé. »
Conclusion :
« Aboû Bakr As-Sidîq n’a pas surpassé les compagnons de Mouhammad par le jeûne et la prière, mais par une chose qui se trouvait dans son cœur. Ce qu’il y avait, c’était l’amour de Dieu et la sincérité envers Ses créatures », déclarait Aboû Bakr Al-Mouznî.Et abondant dans le même sens, Al-Foudayl Ibnou ‘Iyyâd disait : « Celui qui est parvenu, parmi nous, à la maturité n’y est pas parvenu par ses nombreuses pratiques de la prière et du jeûne, mais seulement par la grande générosité de l’âme, le bon état de la poitrine et de la sincérité envers la communauté. »