(16) La prière (9/11) : la prière du vendredi

Jurisprudence malikite

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   L’office commune du vendredi est une adoration obligatoire pour tout musulman pubère ayant atteint l’âge de raison. C’est dans le Coran que cette pratique solennelle trouve son fondement légal : « Ô vous qui avez cru ! Quand on appelle à la çalât du jour du Vendredi, accourez à l’invocation d’Allâh et laissez tout négoce.

Cela est bien meilleur pour vous, si vous saviez ! Puis quand la çalât est achevée, dispersez-vous sur terre et recherchez [quelque effet] de la grâce d’Allâh, et invoquez beaucoup Allâh afin que vous réussissiez. Quand ils entrevoient quelque commerce ou quelque divertissement, ils s’y dispersent et te laissent debout. Dis : “Ce qui est auprès d’Allâh est bien meilleur que le divertissement et le commerce, et Allâh est Le Meilleur des pourvoyeurs.” », s.62 Al-Joumou‘a (Le Vendredi), v.9-11.

Les conditions d’obligation

   Les circonstances qui rendent la prière publique du vendredi obligatoire sont au nombre de cinq :

1 – résider de manière permanente dans l’agglomération où s’accomplit la prière du vendredi ; cette office ne s’impose donc pas au voyageur, à moins qu’il n’envisage de rester quatre jours ou plus dans cette ville ;

2 – être libre ; les esclaves n’étaient pas tenus d’y assister ;

3 – être un homme pubère. La présence de l’enfant capable de se tenir correctement est recommandée pour qu’il s’habitue à ce culte ; il est permis à la femme d’un certain âge d’accomplir cette pratique ; concernant la jeune femme, sa participation est réprouvée ; quant à la femme dont la beauté risque de déconcentrer les hommes, sa présence est interdite. Ces avis ont été émis à une époque où les rangs de prière des femmes se trouvaient juste derrière ceux des hommes ; aujourd’hui, les orants et les orantes étant séparés, il n’y a aucun mal à ce que les femmes se rendent à la mosquée tant qu’elles observent la décence. Le Prophète  a d’ailleurs précisé : « N’empêchez pas vos femmes de se rendre dans les mosquées (pour prier), et leurs demeures sont meilleures pour elles (par rapport aux mosquées). » [Rapporté par Aboû Dâwoûd.]

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4 – habiter à une distance maximale d’un farsakh (l’équivalent de trois milles marins, soit 5,5 km de la mosquée où se déroule la cérémonie ; un autre avis considère que celui qui réside à deux farsakh ou moins de la mosquée doit également assister à la prière du vendredi. D’ailleurs, Al-Boukhârî rapporte qu’Anas Ibnou Mâlik , lorsqu’il occupait son château situé à Az-Zâwiya, à deux parasanges de Bassora, n’assistait que parfois à la prière du vendredi ;

5 – ne pas présenter d’excuse légale dispensant le fidèle de participer à l’office.

   En effet, plusieurs motifs exemptent le croyant d’assister à la prière du vendredi :

– l’âge avancé ;

– la maladie ou la faiblesse corporelle ;

– la crainte d’être emprisonné, battu ou offensé dans son honneur, ses biens ou sa personne ;

– un temps venteux et pluvieux (orageux ou pluie abondante) ;

– la présence d’une boue quasi liquide sur les voies publiques empêchant l’accès à la mosquée.

Les modalités de l’office du vendredi

   Plusieurs conditions particulières déterminant la validité de la prière commune hebdomadaire doivent être respectées :

– l’intégralité de la cérémonie doit s’accomplir dans son temps légal, soit entre le déclin du soleil et le coucher de celui-ci. Les paroles d’Anas Ibnou Mâlik  confirment ce point : « Le Prophète  célébrait la prière du vendredi lorsque le soleil avait dépassé le zénith. » [Authentifié par Al-Boukhârî.] ;

– les participants doivent résider dans l’agglomération où se déroule la prière du vendredi ;

– la cérémonie doit être effectuée dans une grande mosquée solidement bâtie, officiellement désignée pour la célébration de ce culte hebdomadaire. Si plusieurs grandes mosquées coexistent dans une même localité, la prière du vendredi pourra y être célébrée à un autre moment compris dans son temps légal. Dans le rite mâlikite, cette prière ne peut se dérouler dans une maison ou un terrain vague ;

– l’imâm doit prononcer, debout, deux sermons avant de guider la prière du vendredi. Ces prêches (ou « khotbatayn : خُطْبَتَين ») doivent être énoncés en langue arabe dans un style simple et audibles à tous ;

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– l’office doit être dirigée par un imâm habitant dans la ville concernée ou y séjournant plus de quatre jours d’affilée ;

– les sermons et la prière doivent être prononcés par le même imâm, sauf si une excuse légale l’en empêche (saignement de nez par exemple) ;

– l’assemblée doit compter au moins douze fidèles pubères, de sexe masculin et résidents dans la localité où se déroule l’office du vendredi, du début du premier sermon jusqu’à la fin de la prière.

Recommandations adressées à l’imâm

    Plusieurs préconisations concernent directement l’imâm ; il lui est conseillé de :

– saluer les fidèles par la formule consacrée « Assalâmou ‘alaykoum ! », dès son entrée dans la salle de prière ;

– s’asseoir sur la chaire le temps d’écouter l’appel à la prière ;

– regagner la position assise entre les deux prêches (aussi longtemps que l’orant agenouillé entre deux prosternations) ;

– présenter des sermons concis ;

– débuter chaque prêche par les formules de louange à Allâh  et des prières sur le Prophètes  ;

– raccourcir le deuxième sermon par rapport au premier ;

– réciter au moins un verset coranique dans chaque discours ;

– clôturer le second prêche par « yaghfirou-Llâhou lanâ wa lakoum » (Que Dieu nous pardonne, ainsi qu’à vous) ou par « oudhkourou-Llâha yadhkourkoum » (Rappelez-vous de Dieu, Il se rappellera de vous) et par une invocation pour les musulmans en général ;

– s’appuyer sur un sabre ou un bâton.

Actes prohibés durant le prêche du vendredi

   Divers comportements sont à proscrire lors de la prière hebdomadaire. Le fidèle ne doit pas :

– parler et ce, tout au long de l’office ;

– saluer quelqu’un ou répondre au salut, même par un signe ;

– demander miséricorde à voix haute pour celui qui éternue ; il lui est recommandé d’adresser ce vœu en son for intérieur ;

– se nourrir ou s’hydrater ;

– contraindre celui qui discute au silence, ni même le prévenir ;

– entamer une prière surérogatoire lorsque l’imâm pénètre dans la salle de prière. Celui qui est déjà en prière doit interrompre son adoration sans délai ;

– s’adonner à quelque acte commercial comme (re)vendre, louer, s’associer pour affaires, résilier une vente, etc. D’ailleurs, aucune de ces transactions faites entre le second appel à la prière et la fin de celle-ci ne sera valable.

Comportement prescrit au fidèle

Lors de la cérémonie du vendredi, le participant est tenu de :

– se tenir face à l’imâm. Il a été rapporté sur Anas Ibnou Mâlik  qu’il tournait son buste face à l’imâm du début jusqu’à la fin du prêche [Rapporté par Al-Boukhârî.] ;

– se concentrer sur le prêche de l’imâm, même s’il ne comprend pas. Le Coran rappelle l’importance que le fidèle doit donner à la parole de Dieu : « Et quand on récite le Coran, prêtez-lui l’oreille attentivement et observez le silence, afin que vous obteniez la miséricorde [d’Allâh]. », s.7 Al-A‘râf, v.204.

   Il est recommandé au fidèle de prononcer toute formule consacrée comme l’istighfâr  (demende de pardon à Dieu), ta‘awwoudh (demande de protection) en son for intérieur lorsque cela est nécessaire. Il en va de même pour les prières sur le Prophète  ainsi que pour la parole « âmîne » après les invocations.

   En ce jour de vendredi, d’autres recommandations concernent le musulman :

– procéder à la grande ablution. Ce lavage s’applique également à ceux qui ne sont pas tenus d’assister à la prière du vendredi. Aboû Sa‘îd Al-Khoudrî  rapporte ces paroles du Prophète  : « La grande ablution, le jour du vendredi, est obligatoire pour tout pubère qui a effectué un rêve érotique. » [Authentifié par Al-Boukhârî.]

– embellir sa personne en se taillant la barbe et la moustache, en s’épilant les aisselles et le pubis, en se coupant les ongles, en se parfumant, en se parant de ses plus beaux vêtements, etc. En effet, le Prophète  a expliqué : « Tout homme qui aura effectué la grande ablution le jour du vendredi, qui se sera purifié autant qu’il le peut, qui s’enduira de sa pommade ou qui appliquera du parfum qui se trouve chez lui, puis qui se rendra à l’office assez tôt pour ne pas avoir à se glisser entre deux fidèles, qui fera ensuite la prière prescrite et gardera le silence pendant que l’imâm parlera, celui-là verra tous ses péchés commis d’un vendredi à l’autre pardonnés. » [Authentifié par Al-Boukhârî.]

– se rendre, si possible, à pied à la mosquée ;

– lire sourate 18 Al-Kahf (La Caverne) la veille du vendredi ou le matin de ce jour-même ;

– répéter les prières sur le Prophète  ;

– décupler les invocations.

   Il est possible pour le croyant de prendre la route avant la pointe du jour le vendredi, mais cela est réprouvé entre l’aube et le début du déclin du soleil pour certains savants (d’autres l’autorisent tout de même). En revanche, il est strictement interdit au fidèle de voyager après le zénith (az-zawâl), car il est alors dans l’obligation d’assister à l’office du vendredi jusqu’à sa fin.

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