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   Après le déluge, Allâh fit des descendants bénis de Noûh les successeurs du lieu de leur débarquement : ils se multiplièrent et se répandirent sur Terre. Ils constituèrent le peuple de ‘Âd, issu de ‘Aous fils d’Iram fils de Sâm fils de Noûh .

   Les historiens affirment qu’il y a eu deux peuples de ‘Âd : le premier vécut avant l’époque d’Ibrahîm , le second est apparu après la reconstruction de la Ka‘ba. C’est l’histoire du premier qui va être ici racontée : ce peuple s’était établi dans une région appelée Al-Ahqâf entre le Yémen et Oman. Le découpage géographique actuel des territoires identifie Al-Ahqâf dans la région de l’Hadramaout, mais celui de l’époque étudiée était différent. La conséquence est que l’on ne peut exclure l’hypothèse de la localisation de ‘Âd au sud-est d’Oman : à l’appui des photographies satellites de la NASA, Nicolas Clapp, archéologue amateur et arabophile avait mis à jour en 1994, dans la région d’Ubar, une cité engloutie, « l’Atlantis des sables », réputée pour être celle d’Iram, autrement dit ‘Âd. La présence de nombreuses colonnes renforcent cette présomption.

   Les gens de ‘Âd étaient robustes : les hommes avaient un corps puissant semblable en fermeté à de l’acier, nul ne pouvait les terrasser et ils ne craignaient personne. Allâh les avaient gratifiés de maintes faveurs, dont le pouvoir, la richesse et l’abondance en toute chose. Leur cité était réputée par la présence d’innombrables et hautes colonnes. Leurs troupeaux de chameaux emplissaient la vallée et lorsque tout leur bétail sortait et traversait leurs splendides terres providentiellement verdoyantes, la magnificence du spectacle visuel ravissait les regards.

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Ubar : vue satellite et reconstitution.

   Cependant, ‘Âd l’opulent était aussi ‘Âd l’ingrat, car il ne remerciait point Le Pourvoyeur de toutes ces grâces.
Bien au contraire, ce peuple s’enflait d’orgueil. Des générations s’étaient écoulées depuis le déluge destructeur : loin du peuple de ‘Âd le souvenir du cataclysme ! Loin de la mémoire de ses gens les récits des anciens à propos du châtiment divin ! La vie et ses parures, la vie et son cortège ininterrompu de joies, de bonheurs et de réussites les avaient absorbés, et ils oublièrent la raison du courroux d’Allâh à l’encontre du peuple de Noûh . Aussi en vinrent-ils à sculpter des idoles et à les adorer assidûment, retombant par là même dans l’erreur du peuple de Noûh .

   Lorsque le cœur infidèle au souvenir d’Allâh se vide de la croyance véritable, lorsque la raison repousse l’unicité de Dieu et associe au Créateur d’autres puissances, illusoires et éphémères, elles, que s’attendre de la part des idolâtres ?

   Le peuple de ‘Âd devint une calamité pour lui-même : l’injustice se propagea dans toute la société, et personne ne pouvait empêcher cette régression morale. La loi du plus fort régnait : les plus âgés manquaient cruellement d’indulgence à l’endroit des plus jeunes, et les plus forts spoliaient les plus faibles.

   Les mœurs de ‘Âd étaient comparables à ceux des animaux les plus féroces : en temps de guerre, ce peuple n’épargnait ni enfants, ni femmes, ni vieillards, et laissait derrière lui ruines et cadavres. Lorsque ‘Âd prenait le dessus sur une cité, il la corrompait et humiliait ses dignitaires.

   Les habitants de ‘Âd ne désiraient plus que le bas monde et ses fastes, ils rivalisaient dans la construction de somptueux maisons et palais. Ils dilapidaient ainsi leur immense fortune, lorgnant tout terrain pour bâtir inlassablement : la moindre parcelle et le moindre mont encore désertés la veille devenaient en un clin d’œil des zones de résidences luxueuses vouées selon eux à l’éternité. La mort ? Les atteindrait-elle un jour ?

   Les pauvres et les miséreux qui ne pouvaient même pas s’offrir un modeste toit pour s’abriter ? Qui se souciait de leur sort ?!

‘Âd était dans cet état d’injustice extrême et de mœurs dissolues lorsqu’Allâh , par miséricorde pour Ses serviteurs, dussent-ils être les plus vils, envoya Son prophète Hoûd à ses contribules.

   Hoûd mit toute son énergie et son éloquence à prêcher son peuple, l’invitant à considérer les innombrables bienfaits de Dieu et le gâchis dont il faisait preuve à l’égard de ces dons : « Bâtissez-vous par frivolité sur chaque colline un monument? Et édifiez-vous des châteaux comme si vous deviez demeurer éternellement? Et quand vous sévissez contre quelqu’un, vous le faites impitoyablement. Craignez Celui qui vous a pourvus de [toutes les bonnes choses] que vous connaissez, qui vous a pourvus de bestiaux et d’enfants, de jardins et de sources. Je crains pour vous le châtiment d’un Jour terrible », s.26 Ach-chou‘arâ’ (Les Poètes), v.129-135.

أَتَبْنُونَ بِكُلِّ رِيعٍ آيَةً تَعْبَثُونَ
وَتَتَّخِذُونَ مَصَانِعَ لَعَلَّكُمْ تَخْلُدُونَ
وَإِذَا بَطَشْتُمْ بَطَشْتُمْ جَبَّارِينَ
فَٱتَّقُواْ ٱللَّهَ وَأَطِيعُونِ
وَٱتَّقُواْ ٱلَّذِيۤ أَمَدَّكُمْ بِمَا تَعْلَمُونَ
أَمَدَّكُمْ بِأَنْعَامٍ وَبَنِينَ
وَجَنَّاتٍ وَعُيُونٍ
إِنِّيۤ أَخَافُ عَلَيْكُمْ عَذَابَ يَوْمٍ عَظِيمٍ

   Mais ‘Âd n’eut cure des sermons de Hoûd , et ses notables, aveuglés par leur position, traitèrent même le prophète de sot et de menteur. Malgré leur arrogance et leur irrévérence, Hoûd leur délivra un message apaisant et rassurant : ils n’avaient rien à craindre pour leurs biens s’ils suivaient la voie de Dieu, au contraire, Dieu y mettrait de la bénédiction.

   Mais son peuple persévéra orgueilleusement dans son égarement, refusant d’abandonner leurs multiples faux dieux adulés par leurs ancêtres pour n’adorer que Le véritable Dieu Unique.Leur outrecuidance les incita même à proférer des inepties du genre : Hoûd serait atteint d’un mal décrété par leurs divinités ! Qu’il fasse donc venir le châtiment divin s’il est des véridiques !Hoûd opposa une belle patience face à leur entêtement.

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   Allâh , toujours par miséricorde pour Ses créatures, leur accorda un sursis en n’envoyant qu’une sécheresse qui dura trois années. Et pendant ce laps de temps, Hoûd essayait en vain d’attendrir leur cœur au rappel Du Vrai Dieu : « Et [Nous avons envoyé] au ‘Âd, leur frère Hoûd, qui leur dit :  » Ô mon peuple, adorez Allâh. Vous n’avez point de divinité à part Lui. Vous n’êtes que des forgeurs [de mensonges]. Ô mon peuple, je ne vous demande pas de salaire pour cela. Mon salaire n’incombe qu’à Celui qui m’a créé. Ne raisonnez-vous pas? Ô mon peuple, implorez le pardon de votre Seigneur et repentez-vous à Lui pour qu’Il envoie sur vous du ciel des pluies abondantes et qu’il ajoute force à votre force. Et ne vous détournez pas [de Lui] en devenant coupables.  » », s.11 Hoûd, v.50-52.

وَإِلَىٰ عَادٍ أَخَاهُمْ هُوداً قَالَ يٰقَوْمِ ٱعْبُدُواْ ٱللَّهَ مَا لَكُمْ مِّنْ إِلَـٰهٍ غَيْرُهُ إِنْ أَنتُمْ إِلاَّ مُفْتَرُونَ
يٰقَوْمِ لاۤ أَسْأَلُكُمْ عَلَيْهِ أَجْراً إِنْ أَجْرِيَ إِلاَّ عَلَى ٱلَّذِي فَطَرَنِيۤ أَفَلاَ تَعْقِلُونَ
وَيٰقَوْمِ ٱسْتَغْفِرُواْ رَبَّكُمْ ثُمَّ تُوبُوۤاْ إِلَيْهِ يُرْسِلِ ٱلسَّمَآءَ عَلَيْكُمْ مِّدْرَاراً وَيَزِدْكُمْ قُوَّةً إِلَىٰ قُوَّتِكُمْ وَلاَ تَتَوَلَّوْاْ مُجْرِمِينَ

   Mais ‘Âd l’inflexible ne quitta pas ses positions funestes. Et pendant que ses habitants attendaient la pluie, ils virent un jour à l’horizon se profiler un gigantesque nuage. Sa vision les réjouit et ils manifestèrent leur allégresse. Selon eux, c’était certain que ce nuage leur amenait l’eau tant espérée.

   Mais Hoûd savait pertinemment qu’il n’en serait rien, qu’au contraire, c’était le châtiment annoncé qui leur parvenait. Il les informa des énormes souffrances que ce nuage allait leur infliger, puis, lui et les croyants qui l’écoutaient quittèrent leur peuple maudit : « Et quand vint Notre Ordre, Nous sauvâmes Hoûd et ceux qui avaient cru avec lui par une miséricorde de Notre part. Et Nous les sauvâmes d’un terrible châtiment », s.11 Hoûd, v.58.

وَلَمَّا جَآءَ أَمْرُنَا نَجَّيْنَا هُوداً وَٱلَّذِينَ آمَنُواْ مَعَهُ بِرَحْمَةٍ مِّنَّا وَنَجَّيْنَاهُمْ مِّنْ عَذَابٍ غَلِيظٍ

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   Durant sept jours et sept nuits, une effroyable tempête de vent glacial s’abattit sur ‘Âd. De mémoire d’homme, nul n’avait assisté à un évènement aussi apocalyptique. De violentes bourrasques en furie déracinaient les arbres et anéantissaient les demeures somptueuses et vaniteuses de ‘Âd ; elles emportaient et projetaient au loin les bestiaux, objet de fierté d’un peuple matérialiste.

   Le sable du désert tournoyait dans le ciel obscurci à l’extrême : nul ne pouvait distinguer quoi que ce fût à deux pas de soi. La terreur envahit les cœurs et les gens se claquemurèrent dans leur maison en espérant se préserver de l’ire divin : mais en ce jour sombre, rien ne pouvait échapper à l’arrêt de Dieu. Où qu’ils se réfugiaient, les habitants de ‘Âd furent fauchés par la mort brutale et implacable…Lorsque le vent tomba, les corps sans vie jonchaient sur le sol tels des troncs de dattier renversés : les oiseaux venaient se repaitre des cadavres pour ne laisser que des carcasses vides au milieu des maisons en ruine.  Ainsi en fut-il de ‘Âd qui renia son Seigneur et se moqua de Ses signes et avertissements.

   Quant à Hoûd , les historiens affirment qu’il s’était réfugié à la Mecque où il s’établit jusqu’à son trépas. Paix à l’âme de Hoûd, serviteur fidèle et véridique Du Très-Haut.

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