Sourate 83 Al-Moutaffifîne (Les Fraudeurs) (3/5)

Tafsir du Saint Coran (articles)

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Verset 18 : Qu’ils prennent garde ! Le livre des bons sera dans le ’Illiyoûn

كَلَّآ إِنَّ كِتَـٰبَ ٱلۡأَبۡرَارِ لَفِى عِلِّيِّينَ

   Dans cette troisième partie (du verset 18 au verset 28), Dieu traite de l’issue des gens qui ont cru au message et se sont conformés à ses préceptes.

  Ce verset commence par l’interjection « kallâ : كَلاَّ », exactement comme le verset 7 qui débute la deuxième partie de la sourate (كَلَّآ إِنَّ كِتَـٰبَ ٱلۡفُجَّارِ لَفِى سِجِّينٍ۬). D’ailleurs les versets 7 et 18 présentent la même forme syntaxique.

   Le contenu de ce verset peut être la continuité du discours adressé aux négateurs lorsqu’ils entreront en enfer. Considéré comme tel, il est en lien direct avec le verset 17 (« on [leur] dira alors : “Voilà ce que vous traitiez de mensonge” » : ثُمَّ يُقَالُ هَـٰذَا ٱلَّذِى كُنتُم بِهِۦ تُكَذِّبُونَ) et le mot « kallâ : كَلاَّ » dénonce ce que les détracteurs traitaient de mensonge, comme le précise ce verset avec justesse.

   Une autre interprétation associe ce verset aux versets 3 à 6, à l’instar du verset 7. En l’occurrence, le mot « kallâ : كَلاَّ » dénonce l’idée fausse selon laquelle ces négateurs pensent qu’ils ne seront pas « ressuscités en un jour terrible, le jour où les gens se tiendront debout devant le Seigneur de l’Univers », v.3-6.

« Al-abrâr : الأَبْرار » est le pluriel de « al-barr : البَرّ » : ce nom désigne celui qui accomplit « al-birr : البِرّ », c’est-à-dire les meilleures œuvres. Cette appellation s’emploie à juste titre pour les enfants bienfaisants envers leurs parents. D’ailleurs Jésus employa ce terme ; Dieu rapporte ses paroles dans le Coran : « Où que je sois, Il m’a rendu béni ; et Il m’a recommandé, tant que je vivrai, la prière et la zakât ; et la bonté envers ma mère. […]», s.19 Maryam, v.31-32.

[…] وَجَعَلَنِى مُبَارَكًا أَيۡنَ مَا ڪُنتُ وَأَوۡصَـٰنِى بِٱلصَّلَوٰةِ وَٱلزَّڪَوٰةِ مَا دُمۡتُ حَيًّ۬ا (٣١) وَبَرَّۢا بِوَٲلِدَتِى

   Le singulier « al-barr : البَرّ » possède deux formes de pluriels : « al-barara : البَرَرَة » et « al-abrâr : الأَبْرار ». Le Coran utilise les deux formes de pluriels ; « al-barara : البَرَرَة » désigne les anges, tandis que « al-abrâr : الأَبْرار » représente les êtres humains pieux.

o31   Dans la langue arabe, selon les termes et leur emploi, il peut exister une forme de pluriel réservée aux entités indéfinies quantitativement et une autre forme attribuée à ce qui est limité en nombre. Lorsque Dieu précise un nombre restreint de mois, Il emploie « achhour : أَشْهُر » ; en revanche, lorsqu’Il parle de plusieurs mois de manière définie, Il utilise « chouhoûr : شُهور » :

– « Le nombre de mois auprès d’Allâh est de douze mois dans la prescription d’Allâh […] », s.9 At-Tawba, v.36.

[…]  إِنَّ عِدَّةَ ٱلشُّہُورِ عِندَ ٱللَّهِ ٱثۡنَا عَشَرَ شَہۡرً۬ا فِى ڪِتَـٰبِ ٱللَّهِ

– : « Le pèlerinage a lieu dans des mois connus […] », s.2 Al-Baqara (La Génisse), v.197.

[…]  ٱلۡحَجُّ أَشۡهُرٌ۬ مَّعۡلُومَـٰتٌ۬ۚ

– « Ceux des vôtres que la mort frappe et qui laissent des épouses : celles-ci doivent observer une période d’attente de quatre mois et dix jours. […] », s.2 Al-Baqara (La Génisse), v.234.

[…]  وَٱلَّذِينَ يُتَوَفَّوۡنَ مِنكُمۡ وَيَذَرُونَ أَزۡوَٲجً۬ا يَتَرَبَّصۡنَ بِأَنفُسِهِنَّ أَرۡبَعَةَ أَشۡہُرٍ۬ وَعَشۡرً۬اۖ

– « Si vous avez des doutes à propos de la période d’attente de vos femmes qui n’espèrent plus avoir de règles, leur délai est de trois mois. De même pour celles qui n’ont pas encore de règles. […] », s.65 At-Talâq, v.4.

[…]  وَٱلَّـٰٓـِٔى يَٮِٕسۡنَ مِنَ ٱلۡمَحِيضِ مِن نِّسَآٮِٕكُمۡ إِنِ ٱرۡتَبۡتُمۡ فَعِدَّتُہُنَّ ثَلَـٰثَةُ أَشۡهُرٍ۬ وَٱلَّـٰٓـِٔى لَمۡ يَحِضۡنَۚ

De même, Dieu utilise le pluriel « bihâr : بِحار » pour un nombre indéterminé d’océans :
– « et les mers allumées,», s.81 At-Takwîr (L’Obscurcissement), v.6.

وَإِذَا ٱلۡبِحَارُ سُجِّرَتۡ

– « et que les mers confondront leurs eaux, », s.82 Al-Infitâr (La Rupture), v.3.

وَإِذَا ٱلۡبِحَارُ فُجِّرَتۡ

   Lorsque le nombre est limité, Il utilise le pluriel « abhour : أَبْحُر » :
– « Quand bien même tous les arbres de la terre se changeraient en qalam, quand bien même l’océan serait un océan d’encre où conflueraient sept autres océans, les paroles d’Allâh ne s’épuiseraient pas. Car Allâh est Puissant et Sage. », s.31 Loqmân, v.27.

وَلَوۡ أَنَّمَا فِى ٱلۡأَرۡضِ مِن شَجَرَةٍ أَقۡلَـٰمٌ۬ وَٱلۡبَحۡرُ يَمُدُّهُ ۥ مِنۢ بَعۡدِهِۦ سَبۡعَةُ أَبۡحُرٍ۬ مَّا نَفِدَتۡ كَلِمَـٰتُ ٱللَّهِۗ إِنَّ ٱللَّهَ عَزِيزٌ حَكِيمٌ۬

   Idem concernant la différence entre « alâf : ءالاف » et « ouloûf : أُلوف » (milliers) qui sont deux pluriels possibles de « alf : أَلْف ».
« alâf : ءالاف » s’emploie pour les nombre limités : « Mais oui ! Si vous êtes endurants et pieux et que les ennemis vous assaillent immédiatement, votre Seigneur vous enverra en renfort cinq mille anges marqués distinctement. », s.3 Âli ‘Imrâne (La Famille de ’Imrâne), v.125.

بَلَىٰٓۚ إِن تَصۡبِرُواْ وَتَتَّقُواْ وَيَأۡتُوكُم مِّن فَوۡرِهِمۡ هَـٰذَا يُمۡدِدۡكُمۡ رَبُّكُم بِخَمۡسَةِ ءَالَـٰفٍ۬ مِّنَ ٱلۡمَلَـٰٓٮِٕكَةِ مُسَوِّمِينَ

« Lorsque tu disais aux croyants : ne vous suffit-il pas que votre Seigneur vous fasse descendre en aide 3000 anges ? », s.3 Âli ‘Imrâne (La Famille de ’Imrâne), v.124.

إِذۡ تَقُولُ لِلۡمُؤۡمِنِينَ أَلَن يَكۡفِيَكُمۡ أَن يُمِدَّكُمۡ رَبُّكُم بِثَلَـٰثَةِ ءَالَـٰفٍ۬ مِّنَ ٱلۡمَلَـٰٓٮِٕكَةِ مُنزَلِينَ

« ouloûf : أُلوف » s’utilise pour un nombre indéterminé : « N’as-tu pas vu ceux qui sortirent de leur demeure – il y en avait des milliers –, par crainte de la mort ? […] », s.2 Al-Baqara (La Génisse), v.243.

[…]  أَلَمۡ تَرَ إِلَى ٱلَّذِينَ خَرَجُواْ مِن دِيَـٰرِهِمۡ وَهُمۡ أُلُوفٌ حَذَرَ ٱلۡمَوۡتِ

C’est aussi le cas de « sounboulât : سُنْبُلات » et « sanâbila : سَنابِلَة », pluriels de « sounboula : سُنْبُلَة » (épi de blé). Dieu dit : « Ceux qui dépensent leur bien dans le sentier d’Allâh ressemblent à un grain d’où naissent sept épis, à cent grains l’épi. […] », s.2 Al-Baqara (La Génisse), v.261.

[…]  مَّثَلُ ٱلَّذِينَ يُنفِقُونَ أَمۡوَٲلَهُمۡ فِى سَبِيلِ ٱللَّهِ كَمَثَلِ حَبَّةٍ أَنۢبَتَتۡ سَبۡعَ سَنَابِلَ فِى كُلِّ سُنۢبُلَةٍ۬ مِّاْئَةُ حَبَّةٍ۬ۗ

   Dans ce verset, Dieu aborde le thème de la multiplication de la récompense, quelle que soit la quantité donnée. Il utilise le pluriel de l’indétermination, bien que le nombre sept soit limité. En revanche, lorsqu’Il parle du même nombre (sept) dans un contexte d’exactitude, Il dit : « Et le roi dit : “en vérité, je vois en rêve sept vaches grasses mangées par sept maigres, et sept épis vert et autres secs […]” », s.12 Yoûssouf, v.43.

[…]  وَقَالَ ٱلۡمَلِكُ إِنِّىٓ أَرَىٰ سَبۡعَ بَقَرَٲتٍ۬ سِمَانٍ۬ يَأۡڪُلُهُنَّ سَبۡعٌ عِجَافٌ۬ وَسَبۡعَ سُنۢبُلَـٰتٍ خُضۡرٍ۬ وَأُخَرَ يَابِسَـٰتٍ۬ۖ

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   Pour en revenir au verset étudié, en parlant des anges, Dieu emploie le pluriel de l’indétermination abondante « al-barara », alors qu’en parlant des pieux humains, Il utilise le pluriel du nombre restreint, car les anges sont beaucoup plus nombreux que les humains. « entre les mains d’ambassadeurs nobles, obéissants », s.80 ‘Abassa, v.15-16.

بِأَيۡدِى سَفَرَةٍ۬ (١٥) كِرَامِۭ بَرَرَةٍ۬

Le mot « ‘illiyîn : عِلِّيِّين » ou « ‘illiyoûn : عِلِّيُّون» selon sa position syntaxique est un mot inexistant du vocabulaire des Arabes de l’époque, à l’instar du mot « sijjîn : سِجِّين ». Néanmoins, il prend racine du mot « ‘oulouww : عُلُوّ » (hauteur, élévation). Conséquemment, plusieurs interprétations sont possibles :
1- le Coran désigne par « ‘illiyoûn : عِلِّيُّون» un endroit valeureux, notamment l’emplacement des livres dans lesquels sont recueillies les œuvres des pieux.
2- Selon Ibnou ‘Abbâs, il s’agit du paradis.
3- Pour Ad-Dahhâk ce terme représente le lotus de la fin « sidra-l-mountahâ : سِدْرَة المُنْتَهَى ».
4- D’après Qatâda, il s’agit d’un endroit au-dessus du 7ème ciel, situé à droite du Trône.
5- Il a été rapporté sur Ibnou ‘Abbâs qu’il a défini « ‘illiyoûn : عِلِّيُّون» comme étant une tablette en péridot (un minéral de couleur vert jaune) accrochée sur le Trône et sur laquelle sont inscrites les œuvres des pieux.
6- Quant à Al-Farâ’, il indique qu’il s’agit de hauteurs infinies.
7- D’autres savants ont privilégié une signification caractéristique des anges, puisque ceux-ci sont des créatures élevées « al-mâlâ’ al-a‘lâ : الملاء الأَعْلى ». Le verset voudrait donc dire « le Livre des pieux est auprès des anges ».
8- Selon une tradition rapportée sur Ibnou ‘Abbâs, les œuvres des pieux ainsi que leurs âmes se trouvent dans le 4ème ciel.

Versets 19-20 : et qui te dira ce qu’est le ’Illiyoûn? – (19) un livre cacheté ! (20)

وَمَآ أَدۡرَٮٰكَ مَا عِلِّيُّونَ (١٩) كِتَـٰبٌ۬ مَّرۡقُومٌ۬ (٢٠)

    Les mêmes remarques énoncées pour les versets 8 et 9 (cf. partie 1) peuvent être appliquées pour ces deux versets, sauf qu’en l’occurrence, Dieu parle de « ‘illiyoûn : عِلِّيُّون » au lieu de « sijjîn : سِجِّين ».

Verset 21 : Les rapprochés [d’Allâh: les Anges] en témoignent.

يَشۡہَدُهُ ٱلۡمُقَرَّبُونَ

   Les rapprochés sont les Anges. Ils connaissent le livre de chaque personne pieuse. Wahb Ibnou Ishâq a même précisé : « Les rapprochés sont Isrâfîl. Lorsqu’un musulman accomplit une bonne œuvre, les anges montent avec son livre qui scintille dans les cieux comme la lumière du soleil sur terre, jusqu’à arriver auprès d’Isrâfîl ; ce dernier cachette alors le livre et inscrit dessus l’issue de la personne. »

   Il a été rapporté sur Ibnou ‘Abbâs qu’il a questionné Ka‘b au sujet de ce verset ; ce dernier répondit : « Lorsque la mort se présente au croyant, les envoyés de Dieu lui viennent, ils ne peuvent alors ni retarder sa mort d’une heure, ni l’avancer. Dès que son heure arrive, ils retiennent son âme et la confient aux anges de la miséricorde. Ces derniers lui montre alors un peu du bien que Dieu lui a apprêté. Ils remontent ensuite son âme dans le ciel. Les meilleurs anges de chaque ciel le saluent jusqu’à ce que son âme atteigne le 7ème ciel. Ils la posent alors devant eux et sans attendre que ses proches prient sur lui, ils disent : « Seigneur, tel est Ton serviteur untel, nous avons pris son âme. Puis ils invoquent Dieu pour lui. Ensuite, ils demandent à voir son livre. Ce dernier, caché sous le Trône, s’ouvre et ils voient ce qu’il y a dedans. Telle est la signification de « kitâboun marqoûm : كِتاب مَرْقوم » (livre cacheté) et « yachhadouhou lmouqarraboûn : يَشۡہَدُهُ ٱلۡمُقَرَّبُونَ » (les rapprochés en témoignent) ».

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Verset 22 : Les bons seront dans [un Jardin] de délice

إِنَّ ٱلۡأَبۡرَارَ لَفِى نَعِيمٍ

  Après avoir parlé de « ‘illiyoûn : عِلِّيُّون », l’endroit où sera protégé le livre des pieux, Dieu parle des délices qu’Il a réservés à Ses meilleurs serviteurs.
Les versets qui suivent dans cette troisième partie s’opposent aux versets 15 à 17 où Allâh décrit l’issue des « foujjâr : الفُجّار ».
Le mot « inna : إِنَّ » et la première lettre du mot « lafî : لَفِي » impliquent la certitude et confirment la véracité de ce qui est annoncé.

Verset 23 : sur les divans, ils regardent

عَلَى ٱلۡأَرَآٮِٕكِ يَنظُرُونَ

   « al-arâ’ik : الأرآئِك » est le pluriel de « al-arîka : الأَريكَة » ; le Coran utilise également une autre appellation : « as-sarîr : السَّرير » dont le pluriel est « sourour : سُرُر ». Mais pourquoi le Coran emploie deux termes différents ? En réalité, « al-arîka : الأَريكَة » représente un lit orné d’or et de pierres précieuses, charpenté d’un toit et entouré de rideaux et de voilages. Le mot « al-arîka : الأَريكَة » vient du verbe « araka : أَرَكَ » qui signifie « résider longtemps ». On dit par exemple « araka ar-rajoulou fî makân : أَرَكَ الرَّجُلُ في مَكان » (l’homme a résidé dans un endroit) ; d’ailleurs « al-aroûk : الأروك » signifie « résidence ». Le mot « al-arâ’ik : الأرآئِك » est mentionné cinq fois dans le Coran pour faire référence aux lits sur lesquels se coucheront où s’accouderont les gens du paradis en compagnie de leurs conjoints :
1- « […] Ils y seront parés de bracelets d’or et se vêtiront d’habits verts de soie fine et de brocart, accoudés sur des divans (biens ornés). Quelle bonne récompense et quelle belle demeure ! », s.18 Al-Kahf (La Caverne), v.31.

[…]يُحَلَّوۡنَ فِيہَا مِنۡ أَسَاوِرَ مِن ذَهَبٍ۬ وَيَلۡبَسُونَ ثِيَابًا خُضۡرً۬ا مِّن سُندُسٍ۬ وَإِسۡتَبۡرَقٍ۬ مُّتَّكِـِٔينَ فِيہَا عَلَى ٱلۡأَرَآٮِٕكِۚ نِعۡمَ ٱلثَّوَابُ وَحَسُنَتۡ مُرۡتَفَقً۬ا

2- « Eux et leurs épouses sont sous des ombrages, accoudés sur les divans. », s.36 Yassîn, v.56.

هُمۡ وَأَزۡوَٲجُهُمۡ فِى ظِلَـٰلٍ عَلَى ٱلۡأَرَآٮِٕكِ مُتَّكِـُٔونَ

3- « et les rétribuera pour ce qu’ils auront enduré, en leur donnant le paradis et des vêtements de soie, ils y seront accoudés sur des divans, n’y voyant ni soleil ni froid glacial. », s.76 Al-Insâne (L’Homme), v.12-13.

وَجَزَٮٰهُم بِمَا صَبَرُواْ جَنَّةً۬ وَحَرِيرً۬ا (١٢) مُّتَّكِـِٔينَ فِيہَا عَلَى ٱلۡأَرَآٮِٕكِۖ لَا يَرَوۡنَ فِيہَا شَمۡسً۬ا وَلَا زَمۡهَرِيرً۬ا (١٣)

   Dans ce verset, préciser qu’ils seront vêtus de soie indique le soin apporté à leur parure pour (plaire à) leurs épouses.

   Les deux dernières occurrences de « al-arâ’ik : الأرآئِك » se trouvent dans sourate Al-Moutafiffîne (v.23 et v.35).

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  En revanche, « as-sarîr : السَّرير » désigne le lit sur lequel on peut s’étendre. En général, lorsque Dieu parle de « sourour : سُرُر », c’est pour faire référence à des divans sur lesquels les gens du paradis s’allongent les uns en face des autres. Ce terme a été utilisé cinq fois dans le Coran :

1- « Et Nous avons arraché toute rancune de leurs poitrines, et ils se sentiront frères, faisant face les uns aux autres sur des lits. », s.15 Al-Hijr, v.47.

وَنَزَعۡنَا مَا فِى صُدُورِهِم مِّنۡ غِلٍّ إِخۡوَٲنًا عَلَىٰ سُرُرٍ۬ مُّتَقَـٰبِلِينَ

2- « Dans les jardins du délice, sur des lits face à face. », s.37 Aç-Çaffât (Les Rangs), v.43-44.

فِى جَنَّـٰتِ ٱلنَّعِيمِ (٤٣) عَلَىٰ سُرُرٍ۬ مُّتَقَـٰبِلِينَ (٤٤)

3- « Accoudés sur des lits bien rangés, et Nous leur ferons épouser des Houris aux grands yeux noirs », s.52 At-Toûr, v.20.

مُتَّكِـِٔينَ عَلَىٰ سُرُرٍ۬ مَّصۡفُوفَةٍ۬ۖ وَزَوَّجۡنَـٰهُم بِحُورٍ عِينٍ۬

En mentionnant le mariage avec les houris après les lits « sourour : سُرُر », le lecteur comprend que les gens du paradis n’occuperont pas ces lits avec leurs épouses houris.

4- « sur des lits ornés [d’or et de pierres précieuses] s’y accoudant et se faisant face. », s.56 Al-Wâqi‘a (L’Evénement), v.15-16.

عَلَىٰ سُرُرٍ۬ مَّوۡضُونَةٍ۬ (١٥) مُّتَّكِـِٔينَ عَلَيۡہَا مُتَقَـٰبِلِينَ (١٦)

5- En décrivant le paradis, Dieu dit : « Là, des divans élevés », s.88 Al-Ghâchiya (L’Enveloppante), v.13.

فِيہَا سُرُرٌ۬ مَّرۡفُوعَةٌ۬

  Dans le verset 23 de sourate Al-Moutaffifîne « عَلَى ٱلۡأَرَآٮِٕكِ يَنظُرُونَ », seuls le verbe et le sujet sont mentionnés ; l’absence du complément d’objet élargit les possibilités et révèle que plusieurs éléments s’offrent à leur vue.

1- ils se délectent visuellement des délices de la rétribution accordée par Allâh et apprécient Sa générosité (avis de ‘Ikrima, Ibnou ‘Abbâs et Moujâhid). Il est rapporté par ‘Abdoullâh Ibnou ‘Omar que le Prophète a dit : « Celui qui a le plus bas degré dans le paradis est celui qui regarde ses biens, ses serviteurs, ses divans sur une distance qui équivaut à 2000 ans de marche. Alors que le meilleur auprès de Dieu est celui qui voit Sa face matin et après-midi, ensuite il [le Messager] a récité ce verset “Des visages ce jour-là seront éclatants qui regarderont leur Seigneur” [s.75 Al-Qiyâma (La Résurrection), v.22-23.] » [Rapporté par Ahmad.]

2- Ils contemplent Dieu. Cette interprétation concorde avec la logique de la sourate et avec l’interprétation du verset 15 selon laquelle Dieu ne se dévoilera pas aux gens de l’enfer. Ce verset confirme donc que, contrairement aux damnés, les bienheureux du paradis auront la possibilité de voir leur Seigneur. Ceci est également corroboré par les versets 22 et 23 de sourate 75 Al-Qiyâma (La Résurrection).

3- Ils observent les gens de l’enfer et l’issue dans laquelle ils ont basculé. Cette explication concorde avec le verset 44 de sourate Al-A‘râf : « Les gens du paradis crieront aux gens du feu : “Certes, nous avons trouvé vrai ce que notre Seigneur nous avait promis. Avez-vous aussi trouvé vrai ce que votre Seigneur avait promis ?” “Oui” diront-ils. Un héraut annoncera alors au milieu d’eux : “Que la malédiction d’Allâh soit sur les injustes” »

Verset 24 : Tu reconnaîtras sur leurs visages, l’éclat de la félicité.

تَعۡرِفُ فِى وُجُوهِهِمۡ نَضۡرَةَ ٱلنَّعِيمِ

   La majorité des lecteurs a lu « ta‘rifou fî woujoûhihim nadhrata an-na‘îm » (tu reconnais l’éclat de la félicité sur leurs visages). Le verset s’adresse ainsi au Prophète ou à toute personne croyante.

   En revanche, Aboûr Ja‘far Al-Qa‘qâ’ et Ya‘qoûb Al-Baçrî, deux des dix lecteurs de référence, lisent ce verset à la voix passive « tou‘rafou fî woujoûhihim nadhratou an-na‘îm » (l’éclat de la félicité se reconnait sur leurs visages).
Les délices ineffables réservés aux gens du paradis engendrent une béatitude unique qui transparait sur leurs visages.

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