(9) La prière (2/11) : l’adhân et l’iqâma

Jurisprudence malikite

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    Avant d’accomplir la prière, il est nécessaire que le fidèle s’assure de l’entrée de son temps légal. Pour cela, un appel en des termes bien définis est lancé pour marquer le début du temps d’une prière canonique : il s’agit de « al-adhân : الأذَان ».Un autre appel précède directement l’accomplissement de la prière : « al-iqâma : الإقَامَة ».

   L’adhân et l’iqâma constituent deux éléments de l’invitation à la prière, apparus au cours de la première année de l’Hégire à Médine, lorsque l’Islam comptait déjà un bon nombre de musulmans. Al-Boukhârî rapporte d’après Anas Ibnou Mâlik  : « Quand les fidèles furent devenus nombreux, ils parlèrent d’indiquer l’heure de la prière par quelque chose qui la leur ferait connaître. Les uns proposèrent d’allumer un feu ; d’autres d’agiter une crécelle. C’est alors que Bilâl reçut l’ordre de prononcer deux fois les termes de l’appel à la prière dit “adhân” et une fois seulement les termes de l’appel dit “iqâma”. »

L’adhân

L’adhân, considéré dans son fond et non dans sa forme, est mentionné dans le Coran : « Ô vous qui croyez ! Quand on appelle à la çalât du jour du Vendredi, accourez à l’invocation d’Allâh et laissez tout négoce. Cela est bien meilleur pour vous si vous saviez ! », s.62 Al-Joumou‘a (Le Vendredi), v.9. Mâlik Ibnou Al-Houwayrith rapporte ces paroles du Prophète  : « Priez comme vous m’avez vu faire ; lorsque viendra l’heure de la prière, que l’un de vous fasse l’adhân et que le plus âgé d’entre vous dirige la prière. » [Rapporté par Al-Boukhârî.] Son statut diffère selon des critères bien particuliers :
– c’est une obligation communautaire (fard kifâya : فَرْض كِفاية) pour les habitants d’une agglomération où s’officie la prière du Vendredi ;
– il est une sunna vivement conseillée (mou’akkada : مُؤكَّدة) dès lors qu’un nombre conséquent de fidèles se réunit à la mosquée ou ailleurs ;
– il est méritoire (« moustahabb : مُسْتَحَبّ) pour celui qui prie seul (idem pour le voyageur) ;
– il est déconseillé (« makroûh : مَكْروه) pour celui qui s’apprête à accomplir une prière dont le temps est déjà passé, une prière surérogatoire ou une prière mortuaire ;
– il est interdit avant le début du temps de la prière, excepté pour celle de l’aube (recommandé).
C’est le mou’adhdhin (المُؤَذِّن : muezzin) qui fait l’appel à la prière. Il est impératif que cette personne soit musulmane, douée de raison, pubère, respectable et de sexe masculin.
Il est interdit pour la femme de lancer l’adhân en présence d’hommes, et interdit ou déconseillé (selon les versions) de le lancer pour elle-même ou en présence de femmes.
Les paroles constitutives de l’appel à la prière (adhân) sont les suivantes :

اللّهُ أَكْبَرُ اللّهُ أَكْبَر

أَشْهَدُ أن لا إلَهَ إلاَّ الله

أَشْهَدُ أن لا إلَهَ إلاَّ الله

أَشْهَدُ أنَّ مُحَمَّداً رَسولُ اللَّه

أَشْهَدُ أنَّ مُحَمَّداً رَسولُ اللَّه

حَيَّ عَلَى الصَّلاة حَيَّ عَلَى الصَّلاة

حَيَّ عَلَى الفَلاح حَيَّ عَلَى الفَلاح
اللّهُ أَكْبَرُ اللّهُ أَكْبَر

لا إلَه إلا اللّه

Transcription :

« Allâhou Akbar ; Allâhou Akbar ;
Ach-hadou al-lâ ilâha illal-Lâh ; Ach-hadou al-lâ ilâha illal-Lâh ;
Ach-hadou anna Mouhammadar-rassoûloul-Lâh ; Ach-hadou anna Mouhammadar-rassoûloul-Lâh ;
Hayya ‘ala-ç-çalâh ; Hayya ‘ala-ç-çalâh ;
Hayya ‘ala-l-falâh ; Hayya ‘ala-l-falâh ;
Allâhou Akbar ; Allâhou Akbar ;
Lâ ilâha illa-l-Lâh. »

Traduction française :

« Dieu est plus Grand ; Dieu est plus Grand ;
J’atteste qu’il n’est de dieu qu’Allâh ; j’atteste qu’il n’est de dieu qu’Allâh ;
J’atteste que Mouhammad est l’Envoyé de Dieu ; j’atteste que Mouhammad est l’Envoyé de Dieu ;
Venez à la prière ; venez à la prière ;
Accourez à la réussite ; accourez à la réussite ;
Dieu est plus Grand ; Dieu est plus Grand ;
Il n’est de dieu qu’Allâh. »

   Anas Ibnou Mâlik relate : « Bilâl reçut l’ordre de répéter deux fois les termes de l’adhân, mais de ne prononcer qu’une seule fois l’iqâma, sauf pour ces mots : “L’heure de la prière est venue”. » [Rapporté par Al-Boukhârî.]

   Au moment de l’appel à la prière de l’aube, le muezzin ajoutera : « الصّلاة خَيْرٌ مِنَ النَّوْم, الصّلاة خَيْرٌ مِنَ النَّوْم : La prière est préférable au sommeil ; la prière est préférable au sommeil » juste après la formule « Accourez à la réussite ; accourez à la réussite ». En effet, Aboû Mahdhoûra indique : « J’étais le muezzin de l’Envoyé de Dieu et je disais lors du premier adhân de l’aube : “[…] accourez à la réussite ; la prière est préférable au sommeil ; la prière est préférable au sommeil ; Dieu est plus Grand ; Dieu est plus Grand ; il n’est de dieu que Dieu.” » [Rapporté par An-Nassâ’î.]

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    Avant de prononcer deux fois à haute voix la phrase « J’atteste qu’il n’est de dieu que Dieu », il est recommandé au muezzin de la dire à deux reprises et à voix basse, mais de façon perceptible. Il en est de même pour la formule « J’atteste que Mouhammad est l’Envoyé de Dieu » : la prononcer deux fois sans élever le ton avant de l’énoncer à voix haute.
Cette méthode s’appelle le « tarjî’ : التَّرْجيع ».

Quelles sont les conditions de validité de l’adhân ?

Pour être valable, cet appel à la prière exige un certain nombre de conditions bien précises :
1 – Le muezzin doit formuler l’intention dans son for intérieur de lancer l’appel à la prière.
2 – Les formules prononcées doivent se terminer par une consonne non ne comportant pas de voyelle, excepté pour la première formule « Allâhou Akbarou » qu’il est recommandé de terminer par /ru/ et la faire suivre directement par la seconde qui se termine sans voyelle « Allâhou akbar ». Ce qui donne : « Allâhou akbaroul-lâhou akbar ».
3 – Chacune des formules ne doit pas être entrecoupée par un geste, une parole ou un silence.
4 – Les différentes formules doivent être prononcées selon l’ordre établi.
5 – L’adhân doit être fait en langue arabe, sauf si ― n’étant pas arabe ― le muezzin désire appeler à la prière d’autres non-arabes comme lui, ou faire l’adhân pour lui-même.
6 – Le temps de la prière canonique doit avoir débuté, excepté pour la prière de l’aube : il est en effet recommandé de faire un premier appel à la prière au cours du dernier sixième de la nuit ; et il est fortement recommandé de le réitérer au moment du lever de l’aube. Ibnou ‘Omar rapporte ces paroles de l’Envoyé de Dieu  : « C’est Bilâl qui fera l’appel à la prière de la nuit. Mangez donc et buvez jusqu’à ce qu’Ibnou Oummi Maktoûm vous appelle à la prière (au lever de l’aube). » [Rapporté par Al-Boukhârî.] 7 – L’adhân doit être prononcé par la même personne du début jusqu’à la fin. En revanche, il est tout à fait possible que plusieurs muezzins appellent à la prière ensemble.

Quelles sont les recommandations relatives à l’appel à la prière ?

Quelques recommandations peuvent être suivies pour parfaire l’appel à la prière. Il est conseillé :
1 – que le muezzin soit en état de puretés majeure et mineure. Aboû Hourayra relate que le Prophète a en effet énoncé : « Ne fait l’appel à la prière qu’une personne en état de pureté. » [Rapporté par At-Tirmidhî.] 2 – que sa voix soit forte et mélodieuse. Le Prophète expliqua à ‘Abdoullâh Ibnou Zayd  : « Enseigne à Bilâl ce que tu sais et qu’il fasse l’appel à la prière selon tes enseignements, car Bilâl a une voix plus agréable que la tienne. » [Rapporté par Aboû Dâwoûd.] 3 – qu’il appelle à la prière d’un lieu surélevé, comme sur un minaret ou le toit d’une mosquée.
4 – qu’il soit debout pour le faire, excepté si une excuse valable lui permet de s’asseoir. Ibnou ‘Omar rapporte ces dires du Prophète  : « Ô Bilâl, lève-toi et fais l’appel à la prière. » [Rapporté par Mouslim.] 5 – qu’il appelle à la prière en direction de la qibla. Si toutefois il souhaite être entendu, il peut changer de direction pendant l’appel, et même tourner le dos à la qibla, l’essentiel étant qu’il ait commencé son appel vers cette dernière.

Que convient-il de dire lorsque l’on entend l’adhân ?

   Tout musulman et toute musulmane ― même indisposée ― sont invités à répondre à l’appel à la prière. Lorsque l’adhân se fait entendre, il est recommandé de répéter les paroles du muezzin juste après lui. En effet, d’après ‘Omar Ibnou-l-Khattâb , le Prophète a dit : « Si le muezzin dit “Allâhou Akbar ; Allâhou Akbar”, que l’un d’entre vous répète “Allâhou Akbar ; Allâhou Akbar” ; quand il dit “Ach-hadou al-lâ ilâha illâl-Lâh”, qu’il réitère “ Ach-hadou al-lâ ilâha illâl-Lâh ” ; quand il dit “Ach-hadou annâ Mouhammadar-rassoûloul-Lâh”, qu’il répète “ Ach-hadou annâ Mouhammadar-rassoûloul-Lâh ”. Arrivé à “Hayya ‘ala-ç-çalâh”, qu’il affirme “lâ hawla wa lâ qouwwata illâ bil-Lâh” ; et après “Haya ‘ala-l-falâh”, qu’il répète “lâ hawla wa lâ qouwwata illâ bil-Lâh”. Puis quand il dit “Allâhou Akbar ; Allâhou Akbar”, il dit “Allâhou Akbar ; Allâhou Akbar” et enfin lorsqu’il dit “lâ ilaha illl-Lâh”, il répète “lâ ilaha illal-Lâh”. S’il fait cela de tout son cœur, il ira au paradis. » [Rapporté par Mouslim et Aboû Dâwoûd.]

   Si le fidèle entend plusieurs appels en même temps, il lui suffit de répondre à l’un d’entre eux pour remplir cette recommandation.
Il est conseillé à celui qui entend l’appel à la prière, alors qu’il accomplit une prière surérogatoire, de réitérer les formules à la fin de sa prière et non pendant. Il est également conseillé à celui qui lit, enseigne ou étudie le Coran, à celui qui mentionne Allâh , ou encore à celui qui s’alimente, d’interrompre ses occupations pour répondre à l’adhân

   Après avoir répondu à l’appel à la prière, il est recommandé de prier sur le Prophète et de prononcer cette invocation :

اللهُمَّ رَبَّ هَذِهِ الدَّعوَةِ التّامَّة

والصَّلاةِ القائِمَة

آتِ مُحمَّداً الْوَسيلَةَ وَالفَضيلَة

وَابْعَثْهُ مَقاماً مَحْموداً الّذي وَعَدْتَه

إنَّك لاتُخْلِفُ الميعادْ

« Allâhoumma rabba hâdhihi-d-da‘wati-t-tâmmah, wa-ç-çalâti-l-qâ’imah, âti Mouhammadan al-wasîlata wa-l-fadîlah, wa b‘ath-hou maqâman mahmoûdan alladhî wa‘adtah. » « Ô mon Dieu ! Seigneur de cet appel parfait et de cette prière que l’on va accomplir, donne à Mouhammad la place éminente et la supériorité, mets-le à la position glorieuse que Tu lui as promise. » En effet, d’après Jâbir , le Prophète a dit : « Celui qui, après avoir entendu l’appel à la prière, prononce cette formule […], mon intercession lui sera acquise le jour de la Résurrection. » [Rapporté par Al-Boukhârî.]

L’iqâma

   Quant à l’iqâma, il s’agit de l’annonce de l’accomplissement de la prière canonique formulée en des termes précis :

اللّهُ أَكْبَرُ
اللّهُ أَكْبَرُ
أَشْهَدُ أن لا إلَهَ إلاَّ الله
أَشْهَدُ أنَّ مُحَمَّداً رَسولُ اللَّه
حَيَّ عَلَى الصَّلاةِ
حَيَّ عَلَى الفَلاحِ
قَد قامَتِ الصَّلاةُ
اللّهُ أَكْبَرُ
اللّهُ أَكْبَرُ
لا إلَه إلا اللّه

Transcription :

« Allâhou Akbarou ; Allâhou Akbarou ;
Ach-hadou al-lâ ilâha illal-Lâh ;
Ach-hadou anna Mouhammadar-rassoûloul-Lâh ;
Hayya ‘ala-ç-çalâti ;
Hayya ‘ala-l-falâhi ;
Qad qâmati-ç-çalâtou [une seule fois chez les mâlikites] ;
Allâhou Akbarou ; Allâhou Akbarou ;
Lâ ilaha illâ-l-Lâh. »

   Il est vivement recommandé pour l’homme et la femme qui prient seuls de lancer l’iqâma à voix basse avant d’entamer une prière canonique, même si cette dernière est rattrapée. Si la prière est accomplie en groupe, l’iqâma se fait à voix haute. Dans le cas où l’assemblée se compose d’un homme accompagné de sa femme et éventuellement de son enfant, c’est au chef de famille de lancer l’iqâma. Prononcer l’iqâma rapidement est également une recommandation.

   Si le fidèle oublie de le lancer, sa prière reste valide. Idem si l’iqâma est omis volontairement, mais le fidèle demandera pardon à Dieu.

Concernant l’iqâma, il est recommandé :

– qu’il soit fait par la personne qui a fait l’adhân ;
– que cette personne soit en état de pureté, debout et en direction de la qibla.

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