Commentaire de l’aphorisme 12 (article)

Sagesses d'Assakandarî (articles)

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ما نفعَ القلبَ مِثلُ عُزلةٍ يدخُلُ بها مَيدانَ فِكرة

   « Rien n’est utile au cœur autant qu’une solitude qui fait entrer dans le domaine de la méditation »

Cet aphorisme est étroitement lié au précédent : « Ensevelis-toi dans une terre obscure : ce qui pousse avant d’être mis en terre ne parvient pas à maturité ». En effet, l’aphorisme précédent s’adresse à celui qui débute dans l’acquisition du savoir ou s’engage dans un travail de prédication : l’anonymat lui est nécessaire dans un premier temps avant d’accéder à la notoriété. Quant à celui-ci, il concerne autant le débutant que l’initié. Il leur suggère de consacrer quelques moments de leur vie à une solitude méditative.

Définitions

L’utilité dont parle Ibnou ‘Atâ’i Allâh se rapporte à la fois à l’ici-bas et à l’au-delà. Dans la vie première, la solitude qui ouvre les portes de la méditation à l’aspirant permet à celui-ci d’acquérir la sérénité, le calme, l’équilibre, la lucidité et tous les outils psychiques et spirituels qui l’aident à se préserver des malheurs du cœur durant son existence sur terre.

Dans l’au-delà, cette solitude qui mène à la méditation permet au fidèle de purifier son cœur de toutes les maladies qui l’empêchent de cheminer dans la croyance et de pratiquer sa religion dans des conditions optimales, que ce soit dans la forme ou dans le fond.

Le cœur dont il est question dans cet aphorisme fait référence à la raison, à la profondeur de l’être, à la source des sentiments qui se développent, qui s’amenuisent ou qui glorifient. Il s’agit également de l’aptitude de l’homme à réceptionner le savoir véridique et la connaissance de Dieu. Allâh  dit dans le Coran : « Il y a bien là un rappel pour quiconque à un cœur et prête l’oreille tout en étant témoin. », s.50 Qâf, v.37.

Le cœur, c’est aussi ce centre physique dans le corps de l’homme qui ressent la quiétude à l’évocation de Dieu ou fait sombrer la personne dans l’anxiété, l’angoisse voire la dépression lorsqu’elle est brusquée par les problèmes de la vie et qu’elle n’arrive pas à relativiser.

Le Coran témoigne de cette vérité : « Ceux qui ont cru, et dont les cœurs se tranquillisent à l’évocation d’Allâh. N’est-ce point par l’évocation d’Allâh que se tranquillisent les cœurs ? », s.13 Ar-Ra‘d (Le Tonnerre), v.28.

La solitude mentionnée dans l’aphorisme renferme deux sens. Il s’agit :

– soit du retrait complet de la société et l’éloignement volontaire physiquement et mentalement du reste des gens ;

– soit du retrait mental des préoccupations des gens et l’éloignement temporaire du cœur du fourmillement de la vie matérielle.

D’après Ibnou ‘Atâ’i Allâh, si l’aspirant souhaite procurer à son cœur un équilibre lui assurant la tranquillité d’esprit ici-bas et lui garantissant une récompense généreuse dans l’au-delà, une seule solution s’offre à lui : se réfugier dans une solitude sereine le menant à une méditation profonde.

Le croyant a effectivement besoin de passer une période de sa vie dans l’anonymat pour échapper à la célébrité, mais il doit également se réserver des moments privilégiés de retraite volontaire l’éloignant de toute vie mondaine pour découvrir Dieu et se découvrir lui-même. Vivre incognito est, dans un premier temps, essentiel pour celui qui se prépare à devenir un acteur social influent et ce, avant le démarrage de sa carrière. Quant aux moments de solitude dont parle Ibnou ‘Atâ’i Allâh dans cette sagesse, ils concernent tout un chacun.

En effet, les éducateurs mystiques comparent la solitude délibérée et temporaire à un régime alimentaire indispensable au malade qui ne souhaite pas aggraver son cas. Ils considèrent en outre, la méditation comme étant un médicament dont l’efficacité serait décuplée durant le régime. Car une diète seule ne peut guérir le malade et un médicament isolé n’éradiquera pas la douleur du souffrant : les deux sont nécessaires pour un traitement efficace.

Certains savants affirment même : « Il n’y a aucun bien en une solitude sans méditation et il n’y a aucun impact à une méditation sans solitude ».

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De quelle solitude s’agit-il ?

Comme il a été indiqué précédemment, il existe deux sortes de solitudes :

– un retrait complet (physique et mental) de la société, avec le choix délibéré de s’isoler et de se cloîtrer seul pour méditer et adorer. C’est par exemple le choix des moines chrétiens qui s’isolent des années, voire toute leur vie dans des monastères. Ils composent une mini société religieuse et se consacrent uniquement aux actes de dévotion, limitant tout contact avec le monde extérieur. C’est également le cas des moines bouddhistes. Ce fut et c’est aussi le choix de certains confrères musulmans qui ont adopté le même principe. Or, Allâh  explique dans le Coran : « Ensuite, sur leurs traces, Nous avons fait suivre Nos [autres] messagers, et Nous les avons fait suivre de Jésus fils de Marie et lui avons apporté l’Evangile, et mis dans les cœurs de ceux qui le suivirent douceur et mansuétude. Le monachisme qu’ils inventèrent, Nous ne le leur avons nullement prescrit. [Ils devaient] seulement rechercher l’agrément de Dieu. Mais ils ne l’observèrent pas (ce monachisme) comme il se devait. Nous avons donné leur récompense à ceux d’entre eux qui crurent. Mais beaucoup d’entre eux furent des pervers. », s.57 Al-Hadîd (Le Fer), v.27.

Cette solitude est donc réprouvée par l’Islam, puisqu’Allâh  a créé l’être humain pour peupler la terre, la construire et répondre aux besoins de sa nature initiale. L’homme est un être foncièrement social. D’ailleurs, le Prophète  a précisé en substance : « Le musulman qui côtoie les gens et patiente devant leur mal est mieux que celui qui ne les côtoie pas et ne patiente pas devant leur mal » [Rapporté par Ibnou Mâja, At-Tirmidhî et Ahmad.]

Comment un croyant qui s’isole des gens peut-il les guider vers Dieu s’il ne connait pas leurs défauts et les contraintes qui les éloignent de Dieu ? Comment une communauté qui choisit le monachisme peut-elle transmettre la parole de Dieu et établir la justice et la bienfaisance si la notion du peuplement de la terre se réduit à la seule construction de monastères et d’édifices religieux ? Comment le choix d’une vie exclusivement religieuse, dans le sens strict du terme, permettra-t-il de développer les sciences profanes qui permettent aussi de découvrir la grandeur de Dieu à travers la découverte de Sa création et des lois naturelles qu’Il a établies ?

– la deuxième notion de solitude est celle dont parle Ibnou ‘Atâ’i Allâh As-Sakandarî. En effet, dans son aphorisme il affirme : « Rien n’est utile au cœur autant qu’une solitude », et non « autant que la solitude ». Il a utilisé un terme indéfini, ce qui implique la diminution « at-taqlîl : التَّقْلِيل » en langue arabe, tandis que les termes définis suggèrent l’exagération « at-takthîr : التَّكْثِير ». L’exemple d’un verset coranique illustre ce propos avec justesse : « Il ne prononce pas une parole sans avoir auprès de lui un observateur prêt à l’inscrire », s.50 Qâf, v.18.

(ما يَلْفِظُ مِنْ قَوْلٍ إلا لَدَيْهِ رَقيبٌ عَتيد)

L’utilisation du mot « qawl : قَول » sans détermination signifie que toute parole – aussi petite soit-elle – sera inscrite par les anges et jugée.

De même, en employant la forme indéfinie, Ibnou ‘Atâ’i Allâh évoque une solitude qui diffère de celle comprise et appliquée par les moines ou leurs imitateurs. Il parle d’une solitude temporaire dans laquelle s’engage l’aspirant de temps à autres pour parvenir à une méditation féconde. La solitude est donc un moyen et la méditation n’est autre que l’objectif auquel doit aspirer le croyant. C’est exactement le même lien qui associe le régime alimentaire (moyen) imposé à un patient pour lui administrer le médicament (objectif) qui lui procure la guérison par la Grâce de Dieu.

En programmant des instants de solitude spécialement dédiés à la méditation (une heure par semaine ou quelques minutes par jour), le croyant éloigne son esprit et son corps des problèmes liés à sa vie profane (travail, famille, passions, etc.). Il se concentre sur un sujet précis pour y réfléchir intensément. Cette médiation profonde est une cure thérapeutique qui soignera le cœur de celui qui s’y adonne et l’immunisera contre tous les maux de la vie terrestre.

Cette méthode est celle qu’emploie le commerçant pour évaluer le résultat de son négoce. Il s’isole de son entourage et s’installe dans un silence absolu pour se consacrer quelques minutes, voire quelques heures à sa comptabilité. Il fait le point sur les erreurs commises, les marchandises lucratives et celles qui ne le sont pas, etc. Sans cette retraite, il serait impossible pour ce négociant de faire le point sur son activité.

Quelle méditation ?

Allâh  rapporte dans le Coran l’invocation formulée par Ibrâhîm  : « Et ne me couvre pas d’ignominie le jour où l’on sera ressuscité, le jour où ni les biens, ni les enfants ne seront d’aucune utilité, sauf celui qui vient à Allâh avec un cœur sain. », s.26 Ach-Chou‘ara’ (Les Poètes), v.87-89.

D’après ces versets, la colère divine s’abattra sur celui qui se présentera avec un cœur malsain le jour du jugement. L’être humain doit donc chercher tout ce qui servira à purifier son cœur en commençant par se poser les questions pertinentes qui l’aideront à trouver la bonne voie : qui suis-je ? Où suis-je ? Qui m’a installé dans ce monde et pourquoi ? Quelles sont mes préoccupations ? Comment établir les priorités de ma vie ? Quelle est mon issue finale ? Dès lors que l’homme croit en Dieu, d’autres interrogations doivent le stimuler : quels sont mes devoirs vis-à-vis de Dieu ? Comment parvenir à estimer Dieu à Sa juste valeur ? Comment répondre à Son appel ? Quel est mon rôle sur cette terre en tant que musulman ? Pourquoi la création de Dieu est-elle si diversifiée ?

Toutes ces questions et bien d’autres encore vont pousser le méditant à trouver les réponses adéquates ou du moins chercher les moyens qui le mèneront à la vérité. Ce n’est qu’en s’isolant de sa vie quotidienne qu’il aboutira à un résultat concluant.

Lorsqu’un fidèle participe à un prêche du vendredi et entend l’imam citer le hadîth dans lequel le Prophète  énonce : « Si le fils d’Adam possédait une rivière en or, il aurait espéré en avoir une deuxième, et s’il en avait deux, il espérerait en avoir une troisième, et rien n’assouvit la cupidité du fils d’Adam si ce n’est la terre et Dieu pardonne à celui qui se repent. », [Authentifié par Al-Boukhârî et Mouslim.]

Si ce croyant est à l’écoute, qu’il ne réfléchit pas aux problèmes rencontrés dans son travail ou qu’il ne s’assoupit pas quelques instants, il sera certainement touché par ces paroles prophétiques. Il se sentira même libéré de sa cupidité durant une courte période en s’identifiant à la situation décrite. Toutefois, cette petite réflexion se limitera à ces quelques minutes de prêche. Dès que cet individu sort de la mosquée et retourne à ses occupations, sa ferveur s’amenuise pour retrouver son état initial.

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En revanche, si ladite personne se réveille la nuit suivante une heure avant la prière d’al-fajr pour accomplir quelques génuflexions, puis qu’elle entame une méditation basée sur le hadîth entendu la veille à la mosquée, l’impact sera différent. En effet, l’état spirituel dans lequel se trouve le croyant est conditionné par le calme ambiant, l’omission des préoccupations quotidiennes, la prière surérogatoire qu’il vient d’accomplir, la sérénité procurée par la psalmodie du Coran et les invocations qui l’ont rapproché de son Seigneur. Tous ces actes spirituels accomplis grâce à cette solitude momentanée vont permettre au fidèle de méditer le hadîth avec plus de recueillement et de le saisir autrement. Sa réflexion lui rappellera quelques textes, mémorisés ou déjà entendus, qui corroborent ce hadîth : « Dis : La mort que vous fuyez va certes vous rencontrer. Ensuite vous serez ramenés à Celui qui connaît parfaitement le monde Invisible et le monde visible et qui vous informera alors de ce que vous faisiez », s.62 Al-Joumou‘a (Le Vendredi), v.8 ; « Le fils d’Adam dit : “Mon bien matériel, mon bien matériel !” Mais le profit de son bien ne consiste pour lui qu’en ce qu’il mange et digère, ou en ce qu’il porte et use, ou en ce qu’il donne en aumône et réserve aux bonnes œuvres. » [Rapporté par Mouslim.]

Il ne fait aucun doute que la méditation de ces textes en étant seul conduira à un résultat bien plus satisfaisant que celui de la veille. Le méditant découvrira certainement qu’il est loin des valeurs citées par ces textes et rongé par ses propres reproches, il décidera de revoir ses priorités. La ferveur qui l’animera diffusera alors son effet positif pendant plusieurs jours, jusqu’à ce qu’il s’engage dans une autre méditation en solitaire.

C’est en appliquant régulièrement cette méthode que ce croyant guérira son cœur de la cupidité, de l’avarice et de l’amour de l’ici-bas.

Une discipline préconisée pour tous les hommes

Si les polythéistes de la Mecque ont refusé de tendre l’oreille au Prophète , c’est parce que leur cœur a été enseveli par les jouissances trompeuses de la vie terrestre et qu’ils n’ont pas pris le temps de méditer ses paroles loin de l’influence de leurs pairs égarés. Dieu s’adressa alors à ces idolâtres et s’adresse par la même occasion à tout mécréant : « Dis : “Je vous exhorte seulement à une chose : que pour Dieu vous vous leviez, par deux ou isolément, et qu’ensuite vous réfléchissiez. Votre compagnon (Mouhammad) n’est nullement possédé : il n’est pour vous qu’un avertisseur annonçant un dur châtiment” », s.34 Saba’, v.46.

Si ces gens prenaient le temps de réfléchir isolément ou par deux en se posant les questions appropriées, ils se rendraient vite compte que les vilenies et les accusations par lesquelles ils dénigrent le Prophète  sont sans fondement. Ils découvriraient le Messager véridique tel qu’il est réellement.

À la lecture de la biographie de l’Envoyé de Dieu, le croyant apprend qu’il aimait s’isoler avant même de devenir Prophète et Allâh lui ordonnait de se retirer même après le début de la révélation. Sa mission et sa responsabilité ne lui permettaient cependant pas de rester en retraite sur de longues périodes ou loin de ceux qu’il devait exhorter. Ainsi, Dieu lui révéla une solution qui concilie son devoir de côtoyer les gens et la nécessité de s’isoler pour méditer : « Ô toi, l’enveloppé [dans tes vêtements] ! Lève-toi [pour prier], toute la nuit, excepté une petite partie ; sa moitié, ou un peu moins ;  ou un peu plus. Et récite le Coran, lentement et clairement. Nous allons te révéler des paroles lourdes. La prière pendant la nuit est plus efficace et plus propice pour la récitation. Tu as, dans la journée, à vaquer à de longues occupations. », s.73 Al-Mouzzammil (L’Enveloppé), v. 1-7.

La journée est la partie du jour dédiée aux affaires et aux rencontres avec les gens, tandis que la nuit est consacrée aux prières surérogatoires et à la lecture du Coran ; celles-ci n’auraient certainement pas le même impact si elles étaient accomplies dans le tumulte de la vie quotidienne. D’ailleurs, la lecture du Coran pendant les prières diurnes s’accomplit dans le silence, alors que celle des prières nocturnes s’opère à voix haute : la raison est probablement la recherche d’un équilibre entre les bruits de la journée et le silence de la nuit.

Le croyant comprend ainsi mieux pourquoi le Prophète  a incité les musulmans à veiller le dernier tiers de la nuit. La nuit représente en effet un moment privilégié de solitude ; la prière et le rappel correspondent à un outil de méditation : la nuit est le réceptacle, tandis que la méditation est son contenu.

« Rien ne peut être utile au cœur autant qu’une solitude qui le fait entrer dans le domaine de la méditation ».

D’après ‘Oqba Ibnou Abî ‘Âmir  : « J’ai demandé au Prophète , quelle est la délivrance ? » Il me répondit : « Retiens ta langue, que ta maison te contienne et pleure ton péché. », [Rapporté par At-Tirmidhî qui le qualifie de hadîth hassan.]

Ce conseil prodigué par le Prophète  montre bien comment l’homme qui retient sa langue, s’isole chez lui et regrette amèrement son péché trouvera la délivrance. Mais comment le croyant peut-il pleurer ses péchés s’il ne prend pas le temps de s’isoler du monde quelques instants pour faire le point sur sa vie et déceler ses manquements ?

Quels sujets de réflexion ?

Les domaines à méditer sont très nombreux. Le Coran offre plusieurs pistes tirées de lui-même (Livre écrit) et de nombreux exemples sélectionnés dans la création (Livre contemplé) :

– « [Voici] un livre béni que Nous avons fait descendre vers toi, afin qu’ils méditent sur ses versets et que les doués d’intelligence réfléchissent. », s.38 Çâd, verset 29 ;

– « Ne méditent-ils pas sur le Coran ? S’il provenait d’un autre qu’Allâh, ils y trouveraient certes maintes contradictions ! », s.4 An-Nissâ’ (Les Femmes), v.82 ;

– « Pourquoi ne méditent-ils pas sur le Coran ? Ou y a-t-il des cadenas sur leurs cœurs ? », s.47 Mouhammad, v.24 ;

– « En vérité, dans la création des cieux et de la terre, et dans l’alternance de la nuit et du jour, il y a certes des signes pour les doués d’intelligence, qui, debout, assis, couchés sur leurs côtés, invoquent Dieu et méditent sur la création des cieux et de la terre disant : “Notre Seigneur ! Tu n’as pas créé cela en vain. Gloire à Toi ! Garde-nous du châtiment du Feu.” », s.3 Âli ‘Imrâne (La Famille de ‘Imrâne), v.190-191.

Si le musulman prend l’habitude de méditer pendant des moments privilégiés de solitude, il finira par être capable de mener des réflexions profondes sans s’isoler physiquement des autres tout en côtoyant les gens. En parlant des bienfaits de la retraite, Ibnou ‘Abbâd dit : « Ces bienfaits sont le fruit de l’isolement des débutants, quant à ceux qui sont parvenu au bout du chemin, leur isolement les accompagne même s’ils sont parmi les gens parce qu’ils ont acquis la force. »

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