(17) Dhou-l-Kifl

Vie des prophètes

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   Le nombre de prophètes est estimé à 124 000, mais le Coran n’en mentionne que vingt-cinq. Parmi ces élus, Dhou-l-Kifl est cité à deux reprises dans le Livre Saint, juste après la mention du prophète Ayyoub  :

   « Et Ismaël, Idris, et Dhou-l-Kifl ! qui étaient tous endurants ; que Nous fîmes entrer en Notre miséricorde car ils étaient vraiment du nombre des gens de bien. », s.21 Al-Anbiyâ’ (Les Prophètes), v.85-86.

وَإِسۡمَـٰعِيلَ وَإِدۡرِيسَ وَذَا ٱلۡكِفۡلِ‌ۖ ڪُلٌّ۬ مِّنَ ٱلصَّـٰبِرِينَ (٨٥) وَأَدۡخَلۡنَـٰهُمۡ فِى رَحۡمَتِنَآ‌ۖ إِنَّهُم مِّنَ ٱلصَّـٰلِحِينَ

   « Et rappelle-toi Abraham, Isaac et Jacob, Nos serviteurs puissants et clairvoyants. Nous avons fait d’eux l’objet d’une distinction particulière: le rappel de l’au-delà. Ils sont auprès de Nous, certes, parmi les meilleurs élus. Et rappelle-toi Ismaël et Elisée, et Dhou-l-Kifl, chacun d’eux parmi les meilleurs. », s.38 Çâd, v.45-48.

وَٱذۡكُرۡ عِبَـٰدَنَآ إِبۡرَٲهِيمَ وَإِسۡحَـٰقَ وَيَعۡقُوبَ أُوْلِى ٱلۡأَيۡدِى وَٱلۡأَبۡصَـٰرِ (٤٥) إِنَّآ أَخۡلَصۡنَـٰهُم بِخَالِصَةٍ۬ ذِڪۡرَى ٱلدَّارِ (٤٦) وَإِنَّہُمۡ عِندَنَا لَمِنَ ٱلۡمُصۡطَفَيۡنَ ٱلۡأَخۡيَارِ (٤٧) وَٱذۡكُرۡ إِسۡمَـٰعِيلَ وَٱلۡيَسَعَ وَذَا ٱلۡكِفۡلِ‌ۖ وَكُلٌّ۬ مِّنَ ٱلۡأَخۡيَارِ

  Figurant parmi les favoris de Dieu, tout porte à croire que Dhou-l-Kifl est également un prophète, c’est d’ailleurs l’opinion la plus répandue, même si d’autres le qualifient seulement d’homme vertueux et de magistrat intègre. Ces derniers attributs reflètent la pensée d’Ibnou Djarîr qui retient que Dhou-l-Kifl accepta de juger une affaire à la place d’un prophète de son temps et qu’il trancha avec équité. Sa probité lui valut le surnom de « Dhou-l-Kifl » qui signifie en arabe « celui qui fait preuve de loyauté ».

   De surcroît, Ibnou Djarîr et Ibnou Abî Hâtim ont rapporté d’après Dâwoûd Ibnou Abî Hind selon Moujâhid : « Lorsque Elisée devint âgé, il s’est dit : “Si je pouvais charger quelqu’un pour juger entre les gens et voir comment il va se comporter.” Il fit réunir les gens de son peuple et leur dit : “Celui en qui sont réunies ces trois conditions, je le nommerai comme mon représentant : cet homme doit jeûner le jour, veiller en prières la nuit et ne pas se mettre en colère.” Un homme considéré avec dédain par ses concitoyens se leva alors et dit : “Moi !” Elisée lui dit : “Tu jeûnes le jour, tu veilles la nuit en prières et tu ne te mets jamais en colère ?” L’homme lui répondit : “Oui !” Elisée fit réunir les gens trois fois et leur répéta les mêmes propos, et à chaque fois, ce fut le même homme qui lui répondait. Il le nomma alors juge parmi les gens. »

   Agacé par la sagesse et la droiture de Dhou-l-Kifl, Satan ordonna à ses suppôts : « Occupez-vous d’untel ! », mais l’action de ces derniers resta vaine et rien ne put dévoyer le substitut du prophète Elisée. Le diable décida alors de s’en occuper personnellement. Il s’approcha de Dhou-l-Kifl, à l’heure de sa sieste quotidienne, sous l’apparence d’un pauvre vieil homme en litige avec ses proches. Lui promettant de répondre à sa demande, le juge lui demanda de se présenter aux horaires d’ouverture du conseil qu’il préside.

   Le lendemain, tout en honorant ses fonctions au conseil, Dhou-l-Kifl guetta le vieillard mais ce dernier ne se présenta point. Le jour suivant, le vieil homme ne vint pas non plus ; le magistrat attendit même au-delà de son temps de travail mais en vain. Ce n’est que lorsque qu’il s’apprêta à siester comme de coutume que Dhou-l-Kifl entendit le vieillard frapper à la porte. Il s’adressa à lui en ces termes : « Ne t’ai-je pas demandé de venir me voir au conseil ? » L’homme répondit : « Ce peuple est d’une grande fourberie ; si tu leur ordonnes, en plein conseil, de me donner mon droit, ils diront “oui” ; mais lorsque tu partiras, ils me lèseront dans mon droit. » Dhou-l-Kifl lui répéta alors : « Viens me voir quand je serai au conseil. »

   Il reporta toutefois sa sieste à plus tard et se rendit au conseil pour délibérer au sujet de cette affaire qui trainait en longueur. Mais une fois de plus, le vieil homme était absent. Dhou-l-Kifl rentra alors chez lui pour se reposer enfin et insista auprès de ses proches afin que personne ne vienne le déranger durant son sommeil. Mais fidèle à ses habitudes, le vieillard revint au moment même où Dhou-l-Kifl dormait. Malgré son obstination, personne ne l’autorisa à déranger le sommeil du juge, mais sa nature démoniaque lui permit de se glisser dans la maison à travers une lucarne.

   Le diable, toujours sous l’apparence d’un vieillard, se tenait debout face à Dhou-l-Kifl. Voyant sa porte fermée, le magistrat compris immédiatement à qui il avait à faire et demanda : « Tu es l’ennemi d’Allâh ? » Satan répondit : « Oui ! Tu m’as fatigué en toute chose, alors j’ai fait cela pour te mettre en colère. »

   L’histoire ne s’étale pas sur le dénouement, mais le lecteur imagine aisément avec quelle lucidité d’esprit et quelle placidité Dhou-l-Kifl déjoua le piège d’Iblîs. Il tint non seulement sa promesse vis-à-vis d’Elisée, mais il fit également honneur au surnom que lui donna Allâh  dans le Coran.

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