S’alimenter en Islam : De l’abattage rituel

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Quelles sont les conditions pour qu’un animal à sang chaud soit consommable par un musulman ?
Il y a quatre conditions à respecter :

1. L’animal est licite à la consommation (cf. « S’alimenter en Islam (1) – Les animaux licites et les animaux illicites »)

2. L’abattage est pratiqué par un musulman, un juif ou un chrétien :

   Il est licite de consommer la viande d’une bête sacrifiée par un non-musulman si celui-ci est un scripturaire, et à condition que l’animal sacrifié fasse partie des animaux qu’il est licite de manger dans notre religion. Dieu – Exalté soit-Il – dit : « Vous est permise la nourriture des Gens du Livre ».  « Nourriture », dans ce verset, fait référence aux animaux sacrifiés, conformément à l’opinion d’Ibnou ‘Abbâs et à celle de la majorité des exégètes, et ce, bien que Dieu — Exalté soit-Il —, sache parfaitement que ces gens sont susceptibles de mentionner d’autres noms que celui d’Allâh – Exalté soit-Il – au moment du sacrifice.

   Al-Boukhârî rapporte dans son Sahîh qu’Az-Zouhrî dit : « Il n’y a aucun grief à consommer les sacrifices des Arabes chrétiens. Mais si tu entends l’un d’entre eux mentionner un autre nom que celui de Dieu au moment du sacrifice, alors n’en manges pas. Sinon, Dieu l’a rendu licite bien qu’Il connaisse leur infidélité. »

3. L’animal est abattu en ayant été saigné :

   L’animal doit être égorgé avec un instrument tranchant, même s’il est en pierre ou en bois, susceptible de faire couler le sang et de déchirer les organes. ‘Adiyy Ibnou Hâtim At-Tâ’î rapporte avoir dit : « Ô Messager d’Allâh ! Lorsque nous partons à la chasse, il arrive que nous ne trouvions que des pierres coupantes, ou des lames de bambou. » Le Prophète lui répondit : « Fais couler le sang comme tu veux et mentionne le Nom d’Allâh sur la bête. »

    La gorge (ou la naissance de la poitrine) doit être visée : la gorge est tranchée et la poitrine poignardée de manière à ce que mort s’ensuive.

   Pour l’égorgement, la meilleure façon consiste à trancher à la fois la trachée- artère, l’œsophage, et les deux veines jugulaires.

   Il y a eu en effet beaucoup de divergences à ce sujet : doit-on trancher tout ou une partie de la trachée-artère, l’œsophage, et les deux veines jugulaires ?  Sectionner en grande partie suffit-il ou faut-il couper entièrement ? Au moment de l’égorgement, est-il nécessaire que le larynx soit du côté de la tête ou bien peut-il être du côté du reste du corps ? S’il est du côté du corps, l’animal abattu est-il propre à la consommation ou non ? Est-il obligatoire ou non d’égorger l’animal d’un seul trait sans lever la main ? Etc. Chaque possibilité offerte par chacune de ces questions est défendue par un certain nombre de juristes.

   Cette condition ne vaut plus lorsque l’emplacement approprié est inaccessible, comme lorsque l’animal tombe la tête la première dans un puits, si bien qu’il est difficile d’atteindre sa gorge ou son tronc, ou lorsqu’il s’échappe ou se débat contrairement à sa nature domestiquée. Dans de telles circonstances, il subit le même traitement que les animaux sauvages : il suffit de le blesser avec un objet à n’importe quelle partie de son corps.

   On rapporte dans les deux Sahîhs, selon Nâfi` Ibnou Khoudayj : « Nous étions en voyage avec le Prophète – paix et bénédictions sur lui – lorsqu’un chameau s’échappa. N’ayant pas de chevaux pour le poursuivre, un homme décocha une flèche qui l’arrêta. Le Messager d’Allâh dit : “Ces bestiaux ont parfois des comportements sauvages, lorsque cela arrive comportez-vous avec eux de cette manière.” »

   Les Mâlikites considèrent l’animal coupé de la nuque illicite à la consommation, car pour eux, la mort de l’animal précède la coupure de la trachée artère, l’œsophage et les deux veines jugulaires. Les autres écoles le considèrent comme licite à la consommation au cas où la coupure s’est faite rapidement en associant la colonne vertébrale et la gorge.
Les différentes écoles déconseillent le sectionnement profond de la gorge au point de couper la moelle épinière.
Les chameaux doivent être saignés en station debout, la section s’effectue au bas du cou : annahr. Il en est de même pour les girafes.

4. Le Nom de Dieu ait alors été prononcé :

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Bismillâh calligraphié : « Au Nom de Dieu Le Tout Clément,
Le Tout Miséricordieux »

   La nécessité d’invoquer le Nom de Dieu au moment d’abattre l’animal s’explique comme suit : on exprime ainsi le fait qu’on ne met pas à mort cet animal gratuitement ou par cruauté, mais parce qu’on a besoin de se nourrir. On exprime alors qu’on a, pour ce faire, la permission de Celui qui nous a tous – humains et animaux – créés et donné place sur la planète bleue ; c’est pourquoi on prononce Son Nom.

   Aucun autre nom que celui d’Allâh ne doit être mentionné sur l’animal :
les savants sont unanimes. Car, dans l’Arabie préislamique, les gens faisaient des offrandes à leurs divinités et sacrifiaient à leurs idoles, soit en mentionnant leurs noms au moment de l’abattage, soit sur les autels (offrandes) qui leurs étaient dédiés.

   D’autres savants sont d’avis que l’invocation du Nom d’Allâh est indispensable, mais que cela n’est pas impératif au moment même de l’abattage : il suffit alors de l’invoquer au moment de manger. Car lorsqu’on invoque le Nom d’Allâh sur ce qu’on va manger, au moment de le manger, on ne peut être considéré comme ayant mangé ce sur quoi le Nom d’Allâh n’a pas été invoqué. Dans le Sahîh d’Al-Boukhârî, d’après ‘Aïcha  : « Certains musulmans, nouvellement convertis à l’Islam, dirent au Prophète : “Des gens nous apportent de la viande et nous ignorons s’ils ont prononcé le Nom d’Allâh sur elle lors de l’abattage. Pouvons-nous en manger ou pas ?” Le Prophète répondit : “Prononcez le Nom d’Allâh et mangez-en.” »

   La viande de la bête sacrifiée par un non-scripturaire, comme les zoroastriens qui vouent un culte au feu, est quant à elle illicite pour le musulman, en vertu de la parole du Prophète au sujet des zoroastriens : « Traitez-les comme les Gens du Livre, mais abstenez-vous d’épouser leurs femmes, ou de manger de leurs sacrifices. » Cela signifie que les sacrifices des gens du Livre sont licites, tandis que les sacrifices des zoroastriens et assimilés, sont illicites.

Quelle est la législation en vigueur concernant la consommation du fœtus d’un animal ?

1. Si la femelle le met bas mort, il est illicite à la consommation.

2. Si elle le met bas vivant avant qu’elle ne soit saignée, on ne peut le consommer qu’après sa saignée.

3. Si elle le met bas vivant après qu’elle soit saignée, les mâlikites disent que la saignée de la mère est suffisante, même s’il meurt avant d’être saigné. Les autres écoles exigent de le saigner avant qu’il ne meurt, sans quoi  il est interdit à la consommation.

4. Si elle le met bas mort après qu’elle soit saignée, les hanafites interdisent sa consommation. Les mâlikites exigent qu’il soit complet avec son pelage. Ils se basent sur un hadîth où les compagnons disent « Lorsque le fœtus a son pelage, sa saignée c’est la saignée de sa mère ». Les chafi’ites et les hanbalites permettent sa consommation même sans pelage.
Onze compagnons ont rapporté un hadîth où le Prophète dit : « La saigné du fœtus c’est la saignée de sa mère ».

Quand la consommation d’un animal risquant de mourir suite à une attaque ou un accident est-elle licite ou illicite ?

1.  Si l’animal meurt avant d’être saigné, il est unanimement considéré comme illicite.

2. S’il est saigné avant de mourir, sans que ses organes et des parties vitaux soient atteints,  il est unanimement considéré comme licite.

3.  S’il est touché à un des 5 endroits fatals (la gorge, le cerveau, les tripes, les intestins, la moelle épinière), les mâlikites disent qu’il est illicite même saigné. Les chafiites et les hanbalites disent qu’il est licite si on arrive à le saigner. Pour les hanafites, il faut que l’animal donne signe de vie avant de le saigner.

Est-ce licite de consommer un animal étourdi par électrochoc (électronarcose) avant l’abattage ?

   Voici la réponse du Conseil de Jurisprudence Islamique affilié à la Ligue Islamique Mondiale lors de sa 10e session d’octobre 1987 :

   Si l’animal est toujours vivant après que la décharge électrique lui a été infligée puis il est abattu, alors il a été abattu d’une manière islamique, et de ce fait, il n’y a aucun mal à le manger. Allâh Le Tout-Puissant dit : « Il vous est interdit de consommer la bête morte, le sang, la viande de porc, celle d’un animal immolé à d’autres divinités qu’à Dieu, la bête étranglée, assommée, morte d’une chute ou d’un coup de corne, ou celle qui a été entamée par un carnassier -— à moins qu’elle n’ait été égorgée à temps. »

   S’il s’avère que l’animal a trouvé la mort à cause de la décharge électrique et avant d’être abattu, il s’agit alors d’une charogne interdite à la consommation par les musulmans. Allâh Le Tout-Puissant dit : « Il vous est interdit de consommer la bête morte. »

   Administrer à l’animal une décharge électrique à haute tension avant l’abattage est une sévère torture pour l’animal. L’Islam interdit la torture et encourage la miséricorde et la clémence. Le Prophète a dit : « Certes Allâh a encouragé le bon comportement envers tout ; ainsi quand vous tuez, mettez à mort d’une bonne manière et lorsque vous immolez, abattez d’une bonne manière. Donc chacun d’entre vous doit affûter son couteau, et laisser mourir confortablement l’animal abattu.»

   Si l’animal est exposé à un faible courant électrique de manière à ce qu’il ne fasse pas souffrir l’animal, et qu’il est plutôt entrepris pour soulager l’animal et limiter sa douleur lors de l’abattage, alors il est légalement juste de procéder ainsi, du moment que cela est dans l’intérêt des gens.

   Il est toutefois à noter qu’une expérience a été menée en Allemagne, à l’université d’Hanovre, par le Professeur Schultz et le Dr. Hazim : un animal est abattu après assommage, de la façon classique, tandis qu’un autre est abattu par une profonde incision pratiquée dans ses veines jugulaires, sa trachée- artère et son œsophage. On a pris soin, auparavant, d’implanter sur chacun des deux un électroencéphalogramme et un électrocardiogramme. « Les résultats en ont surpris plus d’un (…). C’est l’animal abattu par la profonde incision qui souffre le moins.

   Trois secondes après l’incision, l’électroencéphalogramme montre en effet un état de profonde inconscience (qui est provoquée par la faible irrigation sanguine du cerveau, due à l’hémorragie). Six secondes après, l’électroencéphalogramme est plat (et il n’y a donc plus de douleur ressentie par l’animal). Pendant le même temps, le cœur continue à battre, et le corps de l’animal se tend vigoureusement (un réflexe dû au système nerveux), ce qui expulse le sang de façon maximale hors du corps, pour une viande plus saine. »

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