Sourate 88 Al-Ghâchiya (L’Enveloppante) (2/4)

Tafsir du Saint Coran (articles)

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Verset 4 : Ils brûleront dans un Feu ardent,

تَصۡلَىٰ نَارًا حَامِيَةً۬

   Le verbe « yaçlâ : يَصْلَى » signifie « être touché par la chaleur du feu ». Pour les Arabes, « al-maçlâ : المَصْلَى » correspond à un grand trou creusé au sol dans lequel sont disposées des braises : un dispositif sain et efficace pour cuire un mouton par exemple. Ce mot ne fait donc pas référence à ce qu’on cuit ou brûle sur une poêle, ou directement sur les braises ou encore dans un four.

   La majorité des savants ont lu « taçlâ : تَصلَى ». Quant à Aboû ‘Amr et Aboû Bakr sur ‘Âçim et Ya‘qoûb, ils ont lu « touçlâ : تُصْلَى » qui vient du verbe « açlâ : أَصْلَى » (il lui a transmis la chaleur du feu). Ceci se retrouve dans un autre verset : « Ensuite, brûlez-le dans la fournaise », s.69 Al-Hâqqa (Celle qui montre la vérité), v.31.

ثُمَّ ٱلۡجَحِيمَ صَلُّوهُ

De plus, cette lecture concorde parfaitement avec la forme du premier mot du verset qui suit : « et seront abreuvés d’une source bouillante », s.88 Al-Ghâchiya (L’Enveloppante), v.5.

تُسۡقَىٰ مِنۡ عَيۡنٍ ءَانِيَةٍ۬

On a aussi lu « touçallâ : تُصَلَّى » comme c’est le cas du verset 12 de sourate Al-Inchiqâq selon la lecture de Nâfi‘ : « et il brûlera dans un feu ardent » (وَ يُصَلّى سَعِيرًا).

Normalement, un feu est toujours ardent, alors pourquoi cette précision et ce qualificatif ? Quatre cas de figure sont possibles :

1. Ce feu est toujours ardent contrairement au feu de l’ici-bas qui ne l’est plus une fois éteint.

2. Ce feu constitue à la fois une limite et une frontière à l’accomplissement des péchés commis sur terre. Le Prophète  a expliqué : « …chaque roi a un territoire [ou frontière] gardé. Le champ gardé de Dieu, ce sont les choses défendues. »

« ألا وإنّ لكلِّ ملِكٍ حِمًى ألا وإن حِمى الله محارِمُه »

3. Le feu se protège par lui-même de sorte que personne ne peut le toucher ou l’éteindre, exactement comme un lion protège son territoire. Un poète arabe a déclamé : « Les loups poursuivent celui qui n’a pas de chien et se protègent de celui qui prend des lions pour protecteurs. »

تَعدو الذِّئاب على من لا كَلبَ له وتتَّقي صولةَ المُستأسَد الحامي

4. Le feu est ardent dans le sens où il est coléreux pour se venger des incrédules. On attribue le verbe « hamiya : حَمِىَ » à une personne prise de colère qui souhaite se venger de quelqu’un. Cette explication va dans le sens du verset 8 de sourate Al-Moulk : « Peu s’en faut que de rage il n’éclate […] »

([…]تَكَادُ تَمَيَّزُ مِنَ ٱلۡغَيۡظِ‌ )

Verset 5 : et seront abreuvés d’une source bouillante.

تُسۡقَىٰ مِنۡ عَيۡنٍ ءَانِيَةٍ۬

« Ânâhou : آناهُ », « you’nîhi : يُؤنِيهِ » signifie « l’emprisonner, le retenir, le retarder ». « Al-ânî : الآنِي » qualifie celui dont la brûlure dure un maximum de temps imaginable. Le Prophète  s’est adressé au retardataire lors du prêche du vendredi après qu’il ait traversé les rangées : « آنيت و آذيت » (« tu es en retard et tu as fait du mal »).

   La combustion du feu a duré assez longtemps pour que sa chaleur atteigne son maximum. Les exégètes expliquent : « La chaleur du feu atteint un tel degré qu’une goutte de l’enfer fera fondre les montagnes de la terre » ; et Dieu dit dans le Coran : « Ils feront le va-et-vient entre l’enfer et une eau bouillante extrêmement chaude. », s.55 Ar-Rahmâne (Le Tout-Miséricordieux), v.44.

يَطُوفُونَ بَيۡنَہَا وَبَيۡنَ حَمِيمٍ ءَانٍ۬

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   Devant la chaleur intense de la fournaise, les gens de l’enfer voudront boire d’une source mise à leur disposition, pensant qu’ils pourraient étancher leur soif ; mais le liquide de cette source sera tellement bouillonnant que leurs visages brûleront dès qu’ils s’en approcheront. Cette information est tirée du Coran : « […] Et s’ils implorent à boire on les abreuvera d’une eau comme du métal fondu brûlant les visages. Quelle mauvaise boisson et quelle détestable demeure ! », s.18 Al-Kahf (La Caverne), v.29.

وَإِن يَسۡتَغِيثُواْ يُغَاثُواْ بِمَآءٍ۬ كَٱلۡمُهۡلِ يَشۡوِى ٱلۡوُجُوهَ‌ۚ بِئۡسَ ٱلشَّرَابُ وَسَآءَتۡ مُرۡتَفَقًا   […]

Verset 6 : Il n’y aura pour eux d’autre nourriture que des plantes épineuses

لَّيۡسَ لَهُمۡ طَعَامٌ إِلَّا مِن ضَرِيعٍ۬

   Pour certains savants « ad-darî‘ : الضَّرِيع » désigne une plante nommée « ach-chariq : الشّرِق » lorsque celle-ci se dessèche. Tant que cette plante est encore fraiche, certains animaux comme les chameaux peuvent en consommer, mais dès qu’elle sèche, elle devient vénéneuse.

   D’autres expliquent qu’il s’agit du nom d’un arbre de l’enfer duquel coule un liquide mentionné dans le Coran. Il s’agit d’« al-ghislîn : الغِسْلين », cité dans les versets 35-36 de sourate Al-Hâqqa (Celle qui montre la vérité) : « Il n’a pour lui ici, aujourd’hui, point d’ami chaleureux [pour le protéger], ni d’autre nourriture que du pus. »

(فَلَيۡسَ لَهُ ٱلۡيَوۡمَ هَـٰهُنَا حَمِيمٌ۬ (٣٥) وَلَا طَعَامٌ إِلَّا مِنۡ غِسۡلِينٍ۬  ).

   Le verset 6 d’Al-Ghâchiya et le 36 d’Al-Hâqqa semblent contradictoires : le premier parle d’« ad-darî‘ : الضَّرِيع » comme seule nourriture au gens de l’enfer, alors que le second parle d’« al-ghislîn : الغِسْلين ». Les savants ont apporté deux interprétations pour éclaircir cette ambigüité :

1. L’enfer est constitué de plusieurs degrés. Il est possible que dans certains degrés les châtiés se nourrissent d’« ad-darî‘ : ضَرِيعٍ۬ » et dans d’autres degrés, du pus « al-ghislîn : الغِسْلين ».

2. Le pus provient de l’arbre nommé « ad-darî‘ : الضَّرِيع », et dans ce cas, il n’y a plus d’équivoque. C’est comme si quelqu’un disait : « Je n’ai point de nourriture si ce n’est de la chèvre » et déclarait en même temps : « Je n’ai point de nourriture si ce n’est du lait de chèvre ». En effet Dieu dit « min darî‘ : مِنْ ضَرِيع » ; le mot outil « min : مِنْ » signifie « à partir de », « qui émane de », ce qui coïncide parfaitement avec l’idée étayée dans ce point.

   Enfin, quelques savants avancent que « ad-darî‘ : الضَّرِيع۬ » sont des pierres mangées par les gens de l’enfer.

   Comment pourrait-il y avoir des plantes dans l’enfer ?

   D’une part, Dieu explique dans le Coran que la peau des châtiés sera continuellement renouvelée à chaque brûlure. Cela peut également être le cas pour cette plante ou cet arbre grâce à une régénération cellulaire continue décidée par Allâh .

   D’autre part, certains savants ont justement voulu répondre à cette question en expliquant que « ad-darî‘ : الضَّريع۬ » était le nom des pierres de l’enfer et non celui d’une plante.

Verset 7 : qui n’engraissent, ni n’apaisent la faim.

لَّا يُسۡمِنُ وَلَا يُغۡنِى مِن جُوعٍ۬

« As-simn : السِّمْن » correspond à l’abondance de chair et de graisse chez l’animal. On dit « asmanahou at-ta‘âm : أَسْمَنَهُ الطَّعَامُ » (la nourriture l’a engraissé). « Al-ighnâ’ : الإِغْنَاء » fait référence à la suffisance et au report du besoin. Avec ce vocabulaire, trois interprétations ont été données à ce verset :

1. La nourriture des gens de l’enfer diffèrera de celle des humains sur terre. Il s’agira en effet d’un genre de plantes épineuses consommées par les bestiaux mais qui ne remplira pas le rôle de la nourriture telle qu’on la connaît, à savoir assouvir la faim et apporter les nutriments nécessaires au maintien de la santé du corps.

2. Les gens de l’enfer ne consommeront aucune nourriture. En effet, « ad-darî‘ : الضَّريع۬ » cité dans le verset précédent n’est même pas consommé par les bestiaux, raison de plus pour que les humains ne s’en nourrissent pas. Ce verset peut donc avoir le même sens que l’expression « untel n’a d’ombre que le soleil » qui signifie que cet individu ne dispose d’aucun ombrage où se réfugier.

3. Lorsque les Qoraychites ont entendu le verset 6 qui mentionne « ad-darî‘ : الضَّريع۬ »  comme unique nourriture des châtiés, ils répliquèrent non sans ironie : « Nos chameaux s’engraissent par “ad-darî‘ : الضَّريع۬”, on peut donc le consommer dans l’enfer ». C’est alors que ce verset 7 fut révélé en réponse à leur moquerie. Deux explications sont alors plausibles :

– ce verset dément leur affirmation et précise que cette plante n’engraisse pas et n’apaise pas la faim ;

– leur affirmation est véridique dans la mesure où cette plante sert effectivement de nourriture aux chameaux, mais le végétal dont parle Dieu – même s’il porte un nom identique – n’est pas comestible. Cette plante a donc été citée pour mettre en évidence la condition des châtiés : ils vivront dans l’avilissement et le manquement les plus évidents.

   Ces versets coraniques ont pour objectif de décrire d’une certaine manière un châtiment inimaginable par l’esprit humain. Pour donner au lecteur une image proche de la réalité de ce qui se passera en enfer, le Coran utilise des termes connus des êtres humains ; ces derniers pourront ainsi s’imaginer même approximativement comment se manifestera le courroux divin qui attend les désobéissants.

Verset 8 : Ce jour-là, il y aura des visages épanouis,

وُجُوهٌ۬ يَوۡمَٮِٕذٍ۬ نَّاعِمَةٌ۬

   À partir de ce verset, Allâh  décrit la récompense qu’Il accordera aux croyants qui méritent le paradis.

   Dans sourate ‘Abassa, lorsque Dieu parle du Fracas (ٱلصَّآخَّةُ  ) à partir du verset 33, Il dit : « Ce jour-là il y aura des visages rayonnants : وُجُوهٌ۬ يَوۡمَٮِٕذٍ۬ مُّسۡفِرَةٌ۬ », v.38, mais lorsqu’Il parle des gens de l’enfer, Il dit : « Et il y aura ce jour-là des visages couverts de poussière : وَوُجُوهٌ۬ يَوۡمَٮِٕذٍ عَلَيۡہَا غَبَرَةٌ۬  », v.40. Il utilise la lettre « و » (et), conjonction de coordination servant à relier deux mots ou deux propositions de même nature ou de même fonction. Or, dans le verset 8 de sourate Al-Ghâchiya, Il n’emploie pas cette particule de liaison. Ceci confirme que l’interrogation contenue dans le verset 1 « T’est-il parvenu le récit d’Al-Ghâchiya ? : هَلۡ أَتَٮٰكَ حَدِيثُ ٱلۡغَـٰشِيَةِ » concerne surtout le récit de l’enfer, et non la narration du Jour du jugement, car ces deux entités ne sont pas mises sur le même pied d’égalité dans cette sourate. En effet, dans sourate ‘Abassa, le Fracas fait référence au moment de la Résurrection, donc Dieu parle d’abord des visages rayonnants ; puis, au même titre, Il mentionne des visages couverts de poussière en liant les deux descriptions par la conjonction de coordination « و » (et) ; les deux catégories de personnes sont concernées par le même Fracas.

   En revanche, le sujet principal de sourate Al-Ghâchiya reste la description de l’enfer, contrairement à l’avis de certains exégètes. Les gens du paradis n’étant pas concernés par cette funeste demeure, Dieu parle d’eux séparément, sans relier le récit de leur bonheur à celui du malheur des châtiés. Cette dernière narration est donc un supplément qui rappelle la félicité des croyants dans l’au-delà. À partir de cet éclaircissement, le lecteur comprend pourquoi cette sourate parle d’abord des gens de l’enfer, alors que sourate ‘Abassa débute directement avec les gens du paradis.

   L’adjectif « nâ‘ima : نَاعِمَة » est porteur de deux sens :

1. soit il tire sa racine du verbe « na‘ouma : نَعُمَ », auquel cas il véhicule le sens de « an-nou‘oûma : النُّعومَة » et signifie la douceur, la beauté, la bonne apparence, la jouissance.

   Ce verset décrit l’éclat des visages des gens du paradis ; il a le même sens que le verset 24 de sourate Al-Moutaffifîn (Les Fraudeurs) où Dieu dit : « Tu reconnaîtras sur leurs visages l’éclat de la félicité : تَعۡرِفُ فِى وُجُوهِهِمۡ نَضۡرَةَ ٱلنَّعِيمِ  ». Ce rayonnement provient de la satisfaction que ressentent les adorateurs méritants lorsqu’ils verront la récompense dont ils vont profiter. Cette image vient s’opposer à celle des gens de l’enfer dont les visages sont ternis par l’humiliation.

2. soit il provient du verbe « na‘ima : نَعِمَ ». « An-ni‘ma : النِّعْمَة » qui en découle également signifie « jouir de bienfaits dans la vie ». Dans ce cas, le verset décrit alors « des visages, qui ce jour-là, jouiront des bienfaits du paradis ».

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Verset 9 : contents de leurs efforts,

لِّسَعۡيِہَا رَاضِيَةٌ۬

Ce verset vient en réponse au verset 3 où Dieu informe le lecteur que les visages des gens de l’enfer seront « préoccupés, harassés ». Deux interprétations :

1. Les gens du paradis se réjouiront des efforts qu’ils ont fournis sur terre dans l’obéissance de Dieu. Dans ce cas, la lettre « li : لِ » attachée au premier mot prend le sens de la lettre « bi : بِ » (de). Pendant que les gens de l’enfer œuvraient pour l’ici-bas et s’épuisaient à satisfaire leurs plaisirs, les gens qui mériteront le paradis œuvraient pour Dieu et seront satisfaits plus tard de leurs œuvres en voyant la récompense qu’elles leur auront procurée.

2. Les gens du paradis sont satisfaits de la récompense qu’ils auront au paradis en guise de rétribution pour leurs efforts terrestres.

Verset 10 : dans un haut jardin

فِى جَنَّةٍ عَالِيَةٍ۬

« Al-janna : الجَنَّة» dans ce verset fait référence à la demeure de la récompense. En arabe, ce terme découle de la racine « jan : جن » qui signifie un jardin clôturé et protégé. Cette racine véhicule souvent une idée de protection, de couverture :

– « djinn : جِنٌّ » : terme désignant les démons ; ces êtres sont imperceptibles aux yeux des humains, comme le précise Allâh  dans le Coran au sujet de Satan : « […] Il vous voit, lui et ses suppôts, d’où vous ne les voyez pas. […] », s.7 Al-A‘râf, v.27 ;

– « jounoûn : جُنون » (folie) : se dit de quelqu’un dont la raison est couverte ;

– « janna-l-layl : جَنَّ الليل » : (la nuit a couvert le jour par son obscurité) ;

– « jounna : جُنَّة » (protection) : « le jeûne est une protection [contre les maladies] »

(الصَّوم جُنَّة) comme l’a confirmé le Prophète  dans un hadîth rapporté par Al-Boukhârî.

La hauteur évoquée avec l’adjectif « ‘âliya : عالِيَة » dans ce verset peut être comprise de deux manières :

1. il s’agit de la hauteur en tant que qualité et distinction. Le jardin qu’elle qualifie est plus haut en degrés que les cieux et la terre réunis. En effet, le Jour du jugement, la terre et les cieux actuels disparaitront et le paradis remplacera le tout ; sa largeur sera équivalente aux cieux et à la terre joints les uns aux autres. Dieu dit : « Et concourez au pardon de votre Seigneur, et à un Jardin [paradis] large comme les cieux et la terre, préparé pour les pieux. », s.3 Âli ‘Imrâne (La Famille de ‘Imrâne), v.133.

وَسَارِعُوٓاْ إِلَىٰ مَغۡفِرَةٍ۬ مِّن رَّبِّڪُمۡ وَجَنَّةٍ عَرۡضُهَا ٱلسَّمَـٰوَٲتُ وَٱلۡأَرۡضُ أُعِدَّتۡ لِلۡمُتَّقِينَ

« Au jour où la terre sera remplacée par une autre, de même que les cieux […] », s.14 Ibrâhîm, v.48.

[…]  يَوۡمَ تُبَدَّلُ ٱلۡأَرۡضُ غَيۡرَ ٱلۡأَرۡضِ وَٱلسَّمَـٰوَٲتُ‌ۖ

2. il s’agit de la hauteur en tant que situation physique. Le paradis est en effet constitué de plusieurs degrés placés les uns au-dessus des autres, le plus haut niveau étant le Firdaws, au dessus duquel se trouve le Trône de Dieu : « Mais ceux qui auront craint leur Seigneur auront [pour demeure] des étages [au Paradis] au-dessus desquels d’autres étages sont construits et sous lesquels coulent les rivières. […] », s.39 Az-Zoumar (Les Groupes), v.20.

[…]  لَـٰكِنِ ٱلَّذِينَ ٱتَّقَوۡاْ رَبَّہُمۡ لَهُمۡ غُرَفٌ۬ مِّن فَوۡقِهَا غُرَفٌ۬ مَّبۡنِيَّةٌ۬ تَجۡرِى مِن تَحۡتِہَا ٱلۡأَنۡہَـٰرُ‌ۖ

   Les savants ont divergé sur le nombre de degrés au paradis. La majorité affirme qu’il y en existe une centaine. Ces érudits se basent sur un hadîth rapporté par Al-Boukhârî, dans lequel le Prophète  a dit : « Dans le paradis, il y a cent degrés que Dieu a apprêtés aux moujâhidîn dans son sentier. Ce qui sépare deux degrés équivaut à ce qui sépare le ciel et la terre. Si vous vous adressez à Allâh, demandez-Lui le Firdaws, car il est le meilleur degré et le plus haut du paradis. Au-dessus de lui se trouve le Trône du Miséricordieux et à partir de lui coulent les rivières du paradis. »

   Certains pensent que les degrés du paradis sont au nombre de 6236, autant que les versets du Coran. Un hadîth prophétique rapporté par Aboû Dâwoûd et At-Tirmidhî justifie cet avis : « On dira le Jour du jugement à celui qui lisait le Coran : “Lis et gravis les échelons et les degrés, et psalmodie comme tu faisais sur terre, car ta place sera au dernier verset que tu récitais.” »

Verset 11 : Où ils n’entendent aucune futilité

لَّا تَسۡمَعُ فِيہَا لَـٰغِيَةً۬

Ce verset a été lu de trois manières :

1. « لا تَسْمَعُ فيها لاغِيَةً » (lâ tasma‘ou fîhâ lâghiyatan). Cette lecture est celle de ‘Âçim, Al-Kisâ’î et Hamza, originaires de l’Iraq, ainsi que d’Aboû Ja‘far, un lecteur de Médine.

   Le sujet du verbe « tasma‘ou : تَسْمَعُ » peut être les visages cités dans les versets précédents, ce qui signifie que les gens du paradis n’entendront pas de futilité. Le sujet peut également être le Prophète  puisque le premier verset de cette sourate s’adressait à lui et qu’il sera évidemment au paradis.

2. « لا تُسْمَعُ فيها لاغِيَةٌ » (lâ tousma‘ou fîhâ lâghiyatoun). ’Al-A‘raj, Nâfi‘, Ibnou Kathîr et Aboû ‘Amr ont lu de cette manière. Le sens du verset est plus général : « On n’entend pas de futilité. »

3. « لا يُسْمَعُ فيها لاغِيَةٌ » (lâ yousma‘ou fîhâ lâghiyatoun). Il s’agit de la lecture d’Ibnou-l-Mouhayçin. Le sens du verset est identique à la signification précédente, sauf que le verbe est au masculin.

  Quant à la signification du mot « lâghiya : لاغِيَة », trois explications ont été données :

1. Ce terme découle du verbe « laghâ : لَغَا » « yalghoû : يَلْغُو ». Dans ce cas « lâghiya : لاغِيَة » est considéré comme un nom et a la même signification que « laghw : لَغو » : cela désigne une parole qui ne révèle aucun intérêt. Dieu dit dans le Coran : « On n’y entend nulle parole insignifiante ; seulement “Salâm” […] », s.19 Maryam, v.62.

[…]  لَّا يَسۡمَعُونَ فِيہَا لَغۡوًا إِلَّا سَلَـٰمً۬ا‌ۖ

2. Il s’agit d’un adjectif (çifa : صِفَة) ; le verset prend donc le sens de « Ils n’entendent pas de (parole) futile. »

3. Al-Akhfach explique que « lâghiya : لاغِيَة » est une forme substantivée attribuée au possesseur d’une chose. Ainsi celui qui possède un cheval (فرس) est un chevalier (فارس). « lâghiya : لاغِيَة » désigne donc une personne qui dit des futilités.

   Ibnou ‘Abbâs  a dit : « Dans le paradis on n’entend ni mensonge, ni calomnie, ni mécréance en Dieu, ni insultes ». Toujours dans le même sens, Az-Zajjâj a précisé : « Les gens du paradis ne parlent qu’avec sagesse ».

   Ce verset est donc une invitation à s’écarter de la futilité sur terre : « Qui se détournent de la futilité », s.23 Al-Mou’minoûn (Les Croyants), v.3.

وَٱلَّذِينَ هُمۡ عَنِ ٱللَّغۡوِ مُعۡرِضُونَ

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