Vie génitale féminine (3/4) : menstrues et rapports conjugaux

Thèmatiques juridiques0 commentaires

22

Les règles sont une période particulière de la vie génitale de la femme. Du point de vue de la législation divine, elles ont une influence certaine sur la conduite de la femme indisposée à l’égard des droits de Dieu et sur les droits et devoirs conjugaux.

Un homme doit-il écarter de sa proximité son épouse indisposée ?

   Anas  rapporte que les juifs avaient l’habitude d’éviter de manger et d’avoir des rapports charnels avec leurs épouses lors des menstrues de celles-ci. Les musulmans rejoignent les juifs dans la deuxième attitude, conformément à l’injonction coranique « […] Ils t’interrogent sur les menstrues. Dis : ʺ C’est une souillure ! Abstenez-vous donc de rapports sexuels avec vos épouses pendant les menstrues ! Ne les approchez qu’une fois purifiées ! (yathourna : يَطۡهُرۡنَ ) […]ʺ », s.2 Al-Baqara (La Génisse), v.222. En revanche, les règles sont une particularité propre à la femme de par sa création : rien dans la loi islamique ne justifie le rejet ou la mise à l’écart d’une femme par son conjoint parce que celui-ci croit  qu’elle est une impureté durant cette délicate période.

   Chourayh Ibnou Hânî avait questionné ‘Aïcha  pour savoir si une femme indisposée pouvait manger aux côtés de son mari. Voici la réponse : « Le Messager m’appelait pour manger avec lui lorsque j’étais réglée. Il prenait dans sa main un os encore couvert de viande et me conjurait de le prendre… Je mangeais la viande qu’il y avait, puis il le reprenait et le mettait en bouche à l’endroit où j’avais mordu. Puis il demandait de l’eau à boire et me conjurait de m’abreuver avant lui dans la coupe… Je la prenais et en buvais, puis je la reposais ; alors, il la prenait et en buvait, posant ses lèvres à l’endroit de la coupe où j’avais bu. » [Rapporté par An-Nassâ’î].

   Un hadîth relaté par Aboû Dawoûd rapporte cette parole de la Mère des croyants qui raconte que le Prophète lui avait demandé de découvrir ses jambes alors qu’elle était réglée : « Je les ai découvertes ; il a mis sa joue et sa poitrine sur ma jambe ; je me suis inclinée sur lui et l’ai serré jusqu’à ce qu’il eût chaud : le froid l’avait endolori… »

Qu’entend-on par « Abstenez-vous donc des rapports sexuels avec vos épouses » ? Les câlins entrent-ils dans cette interdiction ?

   Ce sont les rapports complets (avec pénétration du vagin) qui sont prohibés, sinon, l’homme peut jouir de son épouse sur tout son corps, même entre les jambes s’il évite « l’endroit de l’écoulement du sang ». Cette opinion est celle des quatre écoles islamiques réputées, avec des variantes :

    – selon les hanafites et les châfi‘îtes : l’homme est même autorisé à jouir de la vulve de sa femme en intercalant un « izâr : إِزار » (tissu qui ne doit être ni fin ni léger) qui couvre l’épouse du nombril aux genoux.

   – D’après les mâlikites : la présence de l’izâr est obligatoire pour éviter de tomber dans la tentation et dans l’infraction à la loi divine.

   – Les hanbalites et une partie des doctes mâlikites rejoignent la position des hanafites et des châfi‘îtes, mais ajoutent que l’izâr n’est pas obligatoire, car l’interdiction réside dans la pénétration vaginale.

   Les données de la médecine appuient la sagesse divine qui consiste à interdire ces relations sexuelles : le vagin est un milieu protégé par des bactéries utiles qui acidifient le mucus de ses parois, inhibant du coup la prolifération des microorganismes néfastes. Or, en période de menstrues, cette paroi est fragilisée et tout rapport sexuel peut donc être douloureux pour la femme ; le col utérin est plus béant, le taux d’acidité du milieu chute brutalement et les débris de la muqueuse utérine favorisent la culture et la propagation microbiennes, accroissant le risque potentiel d’infection aussi bien pour la femme que pour son époux.

   La législation divine prouve une fois de plus qu’elle est une miséricorde pour la création.

Le coït anal est-il autorisé en cas d’indisposition féminine ?

   La pratique du coït anal en dehors ou lors des menstrues de la femme est formellement illicite.

   Aboû Hourayra  énonce cette parole prophétique : « Celui qui a des coïts avec une femme réglée, ou celui qui a des coïts anaux avec une femme, tout comme celui qui va consulter un voyant, ceux-là n’ont plus de rapport avec ce qui a été révélé à Mouhammad » [Rapporté par At-Tirmidhî].

Mais si l’époux transgresse tout de même l’interdiction, encourt-il une sanction ?

   Avoir des relations sexuelles avec son épouse indisposée est considéré comme un petit péché. Mais récidivée, cette faute devient un grand péché.

   ● Les hanafites, les mâlikites et les châfi‘ites exigent du pécheur qu’il se repente et demande pardon à Allâh .

   ● Les hanbalites, en plus du repentir, préconisent le versement d’une aumône d’un dinar ou de sa moitié comme expiation (« al-kaffâra : الكَفَّارة »). Ibnou Hanbal  se base sur un hadîth que la majorité des doctes ne reconnaissent pas comme authentique.

   ● L’imâm An-Nawawî de l’école châfi‘ite déclarait : « Si le musulman a la conviction (tout en enfreignant la loi divine) que l’acte sexuel avec sa conjointe réglée est licite, il devient par ce fait même un non-musulman, un apostat. Mais s’il commet cet acte sans avoir la conviction qu’il est permis, mais simplement par ignorance ou par oubli (de l’état de sa femme), il n’est pas considéré comme étant en état de péché. S’il le commet délibérément, en connaissant à la fois l’interdiction et l’état de sa femme, il commet un grand péché, et il faut qu’il se repente… »

Les rapports sexuels peuvent-ils reprendre une fois le flux menstruel tari et avant que la femme ne se lave ?

7

   D’après l’école hanafîte : quand les menstrues cessent pendant une durée équivalente à celle qui sépare deux temps de prière (entre celui de la prière de l’asr et celui de la prière du maghreb par exemple), le rapport sexuel avant le lavage corporel complet (« ghousl ») de l’épouse est autorisé.

   Selon les écoles mâlikite, châfi‘ite et la majorité des juristes : ces rapports sont interdits avant le ghousl, et ce, même si la femme lave ses parties génitales.

   Suivant les juristes tels qu’Al-Awza’î et Ibnou Hazm : si la femme s’est lavé les parties génitales, alors son époux peut jouir d’elle.

   Cette divergence entre les juristes réside dans le sens général du verset coranique cité en amont. Le terme « at-tohr : الطُّهْر » signifie-t-il « arrêt du flux menstruel » ou « purification par le lavage » ? S’il s’agit de la seconde réponse, ce mot désigne-t-il le lavage complet ou uniquement celui des parties génitales ? La majorité des savants optent pour la première réponse.

L’époux peut-il avoir des rapports charnels avec sa femme souffrant de métrorragie ?

   Ibnou ‘Abbâs  énonce : « En ce qui concerne la femme atteinte de métrorragie, son mari peut avoir des rapports sexuels avec elle, puisqu’elle prie, et que la prière est plus importante ! », [Rapporté par Al-Boukhârî.]

   La majorité des doctes autorisent les relations sexuelles au cours des métrorragies à partir du moment où la femme entre dans sa période de purification cyclique, selon l’école qu’elle suit. Ahmad Ibnou Hanbal  se singularise en posant une restriction : la métrorragie persiste longuement.

Un homme peut-il divorcer d’avec sa conjointe indisposée ?

   Non, cela n’est pas conforme à la tradition prophétique. Ibnou ‘Omar  a divorcé avec son épouse alors qu’elle avait ses règles. Il rapporte l’intervention du Prophète : « Dites-lui de la garder jusqu’à ce qu’elle soit purifiée, puis réglée, puis de nouveau purifiée ; ensuite, qu’il la garde ou qu’il divorce s’il le veut, mais ceci avant qu’il ne la touche : tel est le délai de viduité que Dieu a prescrit en matière de divorce des femmes » (hadîth authentique).

   Il est utile de rappeler qu’un homme n’a pas le droit de répudier son épouse dans une période de pureté au cours de laquelle il a eu un rapport avec elle.

Quelle est la portée juridique du divorce prononcé à l’encontre de la femme réglée ?

   Ce divorce est appelé « talâq bid‘î : طَلاق بِدْعيِ » et il est effectif de l’avis de la majorité des écoles juridiques, bien qu’il contrarie la sunna. La divergence concerne le lieu de résidence de la femme répudiée :

   ● Aboû Hanîfa, Ach-Châfi‘î et Ibnou Hanbal recommandent à l’époux de la garder au domicile conjugal durant le délai de viduité (« ‘idda : عِدَّة » : période d’attente observée par la femme pour s’assurer qu’elle attend ou non un enfant de son mari).

   ● Mâlik et ses disciples sont d’avis qu’il est obligatoire pour l’homme de garder son épouse au domicile conjugal jusqu’à l’expiration du délai de viduité

8

Ce délai est-il le même pour les femmes selon qu’elles soient enceintes, qu’elles aient des menstrues régulières (l’accoutumée), qu’elles souffrent de métrorragies ou qu’elles soient ménopausées ?

● La divorcée enceinte : selon le Coran, « Et quant à celles qui sont enceintes, elles ont pour terme celui auquel elles accoucheront […] », s.65 At-Talâq (Le Divorce), v.4.

● La divorcée accoutumée :

   Le Coran apporte une réponse précise à son sujet : « Les femmes divorcées doivent observer un délai d’attente de trois menstrues (qouroû’ : قُروء) ; et il ne leur est pas permis de cacher ce que Dieu a créé dans leur matrice ! », s.2 Al-Baqara (La Génisse), v.228.

   Du sens que les juristes donnent au terme « qouroû’ » dépend leur positionnement sur la question du divorce de l’indisposée l’accoutumée : il peut signifier « hayd » (menstrues) ou « at-tohr : الطُّهْر » (purification cyclique).

   – Aboû Hanîfa et Ibnou Hanbal – dans un de ses avis –  définissent « qour’ » comme « hayd », le délai de viduité s’achève par conséquent au déclenchement des troisièmes menstrues suite à la répudiation.

   – Mâlik, Ach-Chafi’î et l’ensemble des savants de Médine optent pour la définition « at-tohr : الطُّهْر », la femme doit donc patienter jusqu’à l’achèvement du troisième cycle menstruel avant de se considérer comme complètement divorcée.

● La divorcée atteinte de métrorragies :

   – Selon Aboû Hanîfa , elle doit savoir distinguer le sang menstruel normal et celui de la maladie (istihâdda). Son délai de viduité est de trois mois, jusqu’à la fin du troisième cycle menstruel.

   – Mâlik  énonce deux opinions : dans la première, la femme doit attendre une année ; dans la seconde, elle doit distinguer le flux menstruel normal du flux métrorragique et attendre un délai de trois périodes de purification cyclique. Pour le cas particulier de la métrorragie, l’imâm fixe à un jour, ou une partie de la journée, la durée minimale des menstrues. Mâlik (Da reconnaît comme valable la période de viduité de la femme qui a avancé sa purification cyclique par médication. Et ce, alors qu’il est interdit pour une femme de prendre des médicaments qui perturbent le fonctionnement de son organisme : l’écoulement sanguin qui en résulte, malgré ses caractéristiques semblables aux menstrues n’est pas pris en compte dans le calcul du délai de viduité.

    – Pour Ach-Châfi‘î , elle doit se baser sur la différenciation des deux sangs pour fixer son délai de viduité.

● La divorcée ménopausée :

    Son délai est connu dans le Coran : « Quant à vos femmes qui n’espèrent plus de règles, si vous avez un doute, leur délai est alors de trois mois. Il en est de même pour celles qui n’ont pas encore de règles […] », s.65 At-Talâq (Le Divorce), v.4

Archives

Catégories

Poser une question

Mettre un lien vers formulaire de contact